Elhadj Mamadou Saliou Diallo, Secrétaire Général adjoint de l’Organisation nationale du syndicat libre de Guinée (ONSLG) ne va pas du dos de la cuillère en accusant la CNTG et son clan de rouler pour le pouvoir. Il n’épargne pas non plus le ministre du Travail, Albert Damantang Camara, qu’il considère comme n’étant pas « un partenaire fiable en matière de relation sociale », dans cet entretien qu’il a bien voulu accorder à notre reporter.
Bonjour Elhadj, les différentes centrales syndicales avaient signé un protocole d’accord l’année dernière avec le gouvernement, sur la flexibilité des prix de carburant à la pompe. Expliquez-nous comment cela se passe aujourd’hui?
Elhadj Mamadou Saliou Diallo : Merci pour la question. D’abord pour un peu revenir en arrière sur cette négociation, j’avoue qu’en décembre 2014 d’abord, un groupe de syndicats sous le label de l’unité d’action syndicale avait dénoncé la tentative de maintenir les prix du carburant à un prix fixe, alors que la dégringolade avait commencé depuis 146 dollars, ça ne faisait que chuter en 2014, au moment où le baril était à 57 dollars usd, nous avons dit non. Trop c’est trop, il faut que le gouvernement revienne sur cette façon de faire. Automatiquement, vous n’êtes pas sans savoir que depuis un certain temps, on est en parfait désamour avec un autre groupe de syndicalistes. Et ce groupe de syndicalistes c’est le chouchou du gouvernement, et par conséquent de ce côté-là, ceux-ci ont pris le flambeau, ont déposé une plateforme et le ministre des Finances de l’époque, Diaré, a essayé d’inviter les différentes centrales autour d’une table. Alors cette invitation, nous nous sommes rendus, moi j’y étais. Malheureusement notre présence dérangeait ceux qui étaient là du côté du groupe syndical, ils ont personnellement demandé au ministre des Finances de nous sortir de la salle. Il faut le dire. Ainsi gentiment, le ministre nous a dit que le lendemain qu’on allait nous appeler, nous autres pour négocier. Nous avons dit d’accord nous avons quitté la salle. Mais on savait que c’était du bluff parce que Mohamed DIARE bon ! C’est le même ‘’SERRE’’, excusez moi du terme. Nous avons quitté la salle. Ils ont négocié. Ils ont négocié en partant de 10 mille francs d’abord le prix. Mais quelle négociation parce que en matière de négociation, il ne s’agit pas de venir autour de la table et dire bon voilà ça a baissé dans tel pays. Ça a baissé dans tel pays, nous voulons que ça soit à tel prix. Il faut déposer un argumentaire, il faut justifier votre position. Je pense que ceci n’a pas été réellement fait. Et nos camarades syndicalistes n’ont pas été vigilants dans la rédaction du protocole. Ce qui fait qu’ils sont tombés sur un protocole. Je dis bien que l’ONSLG ne faisait pas partie, la CGFOG ne faisait pas partie et la COSATREG ne faisait pas partie. Mais pratiquement, nous l’ONSLG comme on avait invité les syndicats, nous étions dans la salle et nous avons quitté. Ils se sont dit qu’ils vont appliquer le principe de la flexibilité. Mais quand on dit flexibilité, il faudrait bien savoir qu’est-ce qu’on entend par flexibilité à ça. Il faudrait bien qu’on sache quels sont les éléments qui rentrent en ligne de compte ? Quelle est la part de chacun, de chaque intervenant, pour qu’on dise que bon voilà tel a ceci, tel a ceci. Donc je pense que l’Etat peut avoir ça et par conséquent le prix peut être fixé à tel. Nous, nous avions fait cette étude à l’époque, nous avons dit à l’époque que le litre d’essence peut être vendu à 6000 fg, sans aucun risque de perte pour l’Etat. A moins que l’Etat n’ait pour objectif de sucer la population, dans ces conditions cet élan a été partagé par beaucoup de travailleurs, par presque l’ensemble de la population. Tout le monde voyait la vérité d’autant plus que le carburant coulait de la Sierra Leone pour être vendu en Guinée en raison de 5000 fg le litre, moins cher et que les transporteurs préféraient d’acheter ceux qui font le long courrier que d’aller à la pompe. Alors on a vu que cet élan-là, s’il continuait, peut-être ce n’était pas bon pour eux. On est passé par d’autres méthodes.
Donc à l’époque, j’avais dit que le 31 décembre 2015 le baril de pétrole serait autour de 30 dollars us, entre 25 et 30 dollars. On m’a mis en relation téléphonique avec le ministre du Commerce, qui a cherché à se débattre. Mais moi je voyais que la courbe était claire, parce que c’est une statistique. Il faut analyser une courbe, si vous ne pouvez pas analyser, vous ne pouvez pas interpréter ce qui peut arriver. C’est comme ce qui se passe aujourd’hui. Si on ne trouve pas la solution avec le problème de l’Etat Islamique, si on ne trouve pas de solution entre la Russie et L’UKRAINE, quelles sont les conséquences, c’est toujours la chute du baril parce que les islamistes utilisent le pétrole pour acheter les armes. Donc il faut casser le pétrole pour qu’ils n’aient pas de financement pour s’approvisionner en armes. Donc au jour d’aujourd’hui, les prévisions pour mars sont entre 15 et 20 dollars us. Les syndicalistes auraient dû aujourd’hui dénoncer cet accord pour pouvoir ouvrir une nouvelle négociation autour du prix du carburant à la pompe, afin de soulager les travailleurs, la population et les différentes composantes de la petite industrie guinéenne, parce que vous n’êtes pas sans savoir le brodeur qui sait que la facture est salée avec EDG préfère acheter 10 litres de carburant, mettre dans son petit moteur et travailler. Le petit soudeur fera la même chose. Il faut dénoncer comme première chose d’abord, il faut dénoncer cet accord, et que l’Etat accepte de revenir autour de la table. C’est-à-dire que ceux qui ont signé ce protocole, si eux, ils ne dénoncent pas un autre groupe de syndicalistes va dénoncer parce que sans dénonciation l’Etat se rive toujours à ce point (1) du préambule sur la variation à 100 dollars us, et à partir de là, l’Etat peut se dire je suis en droit de ne pas négocier parce que c’est écrit, c’est signé.
Elhadj dites-nous pourquoi le syndicat est divisé, et qu’est- ce qu’il faut pour que le syndicat soit une et indivisible pour l’intérêt du peuple de Guinée ?
Bon vous savez, en société humaine, les gens ne peuvent jamais être d’accord surtout. Mais seulement, il y a des valeurs et des principes qu’il faut défendre, c’est lorsque ces valeurs et principes portent en leur sein des quiproquos, c’est ce qui fait que des fois des centrales syndicales peuvent ne pas être d’accord, c’est ce qui sévit actuellement. Maintenant pour que les centrales syndicales puissent travailler ensemble, ça dépendra de la volonté de tous les bureaux exécutifs des différents syndicats, pour que les gens puissent prendre de la hauteur et qu’ils puissent travailler ensemble. Et de savoir qu’on ne travaille pas pour soit même, on travaille pour les autres. C’est un don de soi qu’on fait aux autres, pour que les autres, leurs familles puissent vivre décemment. Voilà nos objectifs. Donc les leaders syndicaux doivent se ressaisir, les leaders syndicaux doivent prendre de la hauteur et travailler, mettre l’orgueil personnel de côté, afin de défendre les valeurs et les principes du syndicalisme universel.
Cette division n’est-t-elle pas liée à des manœuvres politiques?
Non. Ce n’est pas politique, vous savez en Guinée, tout ce qu’on fait, tout qu’on dit, on colle toujours à la politique. Et je vous dis entre le syndicat et la politique, la limite entre les deux c’est un millimètre (mm). Vous comprenez parce que si ça ne va pas, le syndicalisme se réserve le droit d’atterrir sur le terrain politique. Vous avez vu le cas en Pologne, avec Syndicat solidarité, vous avez vu Lula au Brésil, c’est des syndicalistes etc. Donc lorsque la gouvernance ne marche pas, ne va plus, lorsque la déliquescence s’installe alors le syndicalisme atterrit.
Maintenant parlant de l’unité et la solidarité entre les centrales syndicales, voilà !
Pour que les syndicalistes soient unis, c’est d’agir avec le même esprit qu’en 2006, 2007 au moment où en ce moment par la présence de certains leaders syndicaux ; paix à son âme, je veux citer Docteur Fofana, les gens qui étaient là étaient capables en ce moment, au-delà des intérêts personnels, ils se mettaient au-dessus de certaines considérations pour agir ensemble et traiter des questions ensemble, en ce moment on ne disait pas ah ! la CNTG était plus représentative, ceci, cela on composait les choses de façon inclusive, et à partir de là, le débat qui se faisait à la Bourse de travail permettait de trouver une substance. Aujourd’hui avec la situation qui prévaut, moi je voudrais que toutes les centrales syndicales, tous les leaders syndicaux se remettent en cause pour qu’il y ait un déclic dans leurs têtes pour qu’ils sachent qu’au-delà de l’individu, il y a des institutions.
Aujourd’hui le baril de pétrole est à 30 dollars us, en tant que syndicaliste, que faite vous pour que l’Etat diminue le prix du carburant à la pompe?
Nous allons sensibiliser le gouvernement, en attendant qu’on parle le même langage, pourquoi ? Parce que je vous l’ai dis aujourd’hui avec la dualité syndicale qui existe, un groupe pose le problème, l’autre refuse de participer ou donne des consignes à des gens de ne pas intervenir. Vous vous rappelez en février, mars 2015, les gens ont travaillé pour que cette grève ne soit pas suivie. Sinon, dans toutes les antennes et partout les sondages ont montré que 80 pour cent des intervenants étaient en faveur de la baisse du prix du carburant au litre, que nous avons déterminé.
Quelle est la stratégie que vous avez mise en place pour que l’Etat pense à la population, en baissant le prix du carburant cette fois-ci?
Nous allons entamer des contacts. Pour en discuter, on attendait que le Premier ministre s’installe, qu’il commence à travailler. Donc nous allons le rencontrer et nous n’oublions pas que le Premier ministre est chargé entre autres du problème de dialogue social et du développement économique et politique du pays.
Vous dites que les relations entre vous et le ministre du Travail sont nocives. Expliquez-nous comment ?
Non, pas nocive. Mais c’est l’impact de ces relations aujourd’hui qui a un caractère nocif. Mais elles ne sont pas au beau fixe parce qu’il ne peut plus être neutre dans le jeu syndical. Depuis longtemps, il a mené des jeux qui nous ont fait comprendre que c’est n’est plus un partenaire fiable en matière de relation sociale.