J’ai écouté en différé, avec stupéfaction et dégout, une interview datant de début novembre faite par un des derniers tortionnaires identifiés de la 1e République encore vivants. Elle a été pilotée par le directeur général et diffusée par la télévision officielle de l’Etat, la RTG. Ceci est un très mauvais signal envoyé directement aux familles des victimes de cet Etat sur la sincérité et volonté du pouvoir actuel d’agir avec une réelle impartialité pour aboutir à une réconciliation nationale. Comme quoi parler dans tous les discours de réconcilier les Guinéens, mettre en place une commission nationale avec l’appui des Nations-Unies et en même temps encourager sournoisement des journalistes officiels à inviter des criminels retraités pour remuer leurs couteaux dans les plaies encore ouvertes de leurs victimes en dit long sur où et comment l’on veut nous mener dans ce dossier. Pas au pardon et à la réconciliation mais à la moquerie, l’oubli forcé et finalement un balayage de tout notre passé douloureux sous le tapis des bourreaux. Si au moins cela avait été diffusé sur une chaine privée on aurait pu croire que cela venait d’une de leurs succursales en ville et n’était pas juste un reflet de la pensée officielle réelle.
Je ne reviendrais pas en détail sur toutes ses inepties. Ce serait vraiment trop long et lassant pour les lecteurs. Je voudrais juste en relever 3 qui résument bien sa soit disant « volonté de rétablir la vérité historique sur notre passé pour la jeunesse guinéenne » :
- Le 28 septembre 1958, Mr Diallo Telli était à Villard-de-Lance dans le massif du Vercors (France) avec sa famille. Ce n’était pas le fruit du hasard mais plutôt une stratégie : étant le fonctionnaire africain le plus haut placé de l’A.O.F. s’il était resté à Dakar il aurait été mal à l’aise, pour des raisons personnelles, de soutenir le NON dans son milieu professionnel. Il a donc quitté temporairement son poste pendant cette période pour prendre ses vacances annuelles. A son retour à Dakar il a déposé sa lettre de démission au Gouverneur pour pouvoir aller contribuer, comme de très nombreux jeunes cadres Guinéens et de tout le tiers-monde de son âge, à l’expérience exaltante de la Guinée indépendante. Il disait à ses amis proches, y compris certains supérieurs, qu’il ne souhaitait plus travailler avec le pouvoir colonial si son pays était indépendant. Je précise que tous ses amis n’en furent pas étonnés venant de lui. Ils lui souhaitèrent donc bonne chance dans cette aventure quand même périlleuse à leurs yeux.
- Il était comique d’entendre Mr Diané décrire son « rôle central » de conseiller personnel du Président à l’époque. Il dit pourtant lui-même au début qu’il était stagiaire dans le coin, terme pompeux pour dire sentinelle à la porte d’un des salons, chargé de rapporter tout ce que les visiteurs chuchotaient avant d’être reçus. Je suis persuadé qu’il n’a jamais eu le courage de lever les yeux et d’ouvrir la bouche devant le Président et que celui-ci ne l’a jamais remarqué dans le décor, à l’instar des plantes du salon qu’il gardait. Tous ceux qui savaient ce qui se passait à la Présidence à l’époque et qui l’entendent énumérer ses missions de premier plan et la liste des Présidents qu’il a reçu avec son boss se demandent si ce n’est pas lui en fait qui dirigeait en coulisse le pays. Surement des fantasmes de gloire et paillettes typiques de la maladie d’Alzheimer. Doux délire d’un fossile dans la déchéance totale depuis quelques années et qui est prêt à tout pour balancer un scoop médiatique afin de apparaitre une dernière fois sous les projecteurs locaux.
- Il dit que les chefs d’Etat ont cherché un cadre africain francophone pour remplacer Mr Diallo Telli et que c’est pour cela qu’ils ont choisi le Camerounais Nzo Ekangaki. Sachez que ce monsieur est originaire de Nord Cameroun, qu’il était 100% anglophone et qu’il ne pouvait pas dire plus que les salutations d’usage en français. Il serait marrant de revoir une vidéo du tête-à-tête discret entre ce monsieur, notre Président et son conseiller suprême.
Je terminerais « l’énumération des faits précis pour la jeunesse » en disant que ce personnage a joué un rôle central dans la fabrication de complots, les arrestations, les séances de torture et les mises à mort par diète noire de très nombreux pères et mères de famille guinéens dont Mr Diallo Telli qu’il n’avait pourtant jamais vu auparavant mais qu’il haïssait comme la majorité de ses pairs uniquement par jalousie et complexe d’infériorité. Qu’il ose continuer à insulter sa mémoire et sa famille près de 40 ans après en dit long, je pense pour tous, sur ce fonctionnaire-type au sommet de la révolution guinéenne.
Sur ce dernier point tous mes compatriotes qui me lisent savent à quel point j’adore les débats contradictoires entre personnes réfléchies et respectueuses des autres quelque soit les contradictions de nos idées et analyses. Mais dès que certains noms et en particulier celui de ma mère apparaissent dans l’échange, de surcroit par un inconnu qui a participé directement à ses malheurs, l’échange s’arrête immédiatement pour moi. Toutes les personnes imprégnées de notre culture et de nos traditions savent que seules les petites personnes sans dignité et morale utilisent ce genre de pratiques en public. De plus, mentir, calomnier et cracher sur la mémoire de son fils, mon grand frère très récemment disparu, est une autre preuve de cruauté sans nom.
Je n’irais donc pas plus loin pour lui répondre. En fait je ne comptais même pas le faire car il ne mérite à mes yeux que mépris, haine et zapping total. Mais mes proches ont insisté pour que cette même jeunesse qu’il veut intoxiquer ait un aperçu de l’autre face de la médaille révolutionnaire. De toutes les façons la Vérité Historique de ce qui s’est réellement passé en Guinée, la seule qui est conservée dans les encyclopédies et bases de données des universités et centres d’études de renom partout dans le monde ne sera jamais écrite par les tortionnaires et les bourreaux – nulle part cela n’a été le cas. Ces criminels en liberté provisoire – le Bon Dieu les attend avec impatience – ont réussi à nous empêcher d’organiser le procès du PDG en 1984/1985, à l’image de celui de Nuremberg en Allemagne. Ceci aurait permis de fermer immédiatement et à jamais les bouches des derniers révisionnistes guinéens. Hélas plusieurs parmi les soldats qui les ont remplacés au pouvoir avaient leurs mains tâchées du sang de ces mêmes innocents. Sachez Mr Diané que cette histoire est déjà entrain d’être écrite par des historiens professionnels et que votre interview sera un jour déterrée pour confirmer la bassesse de votre gang.
Mr Diané, il parait que vous êtes allé en pèlerinage à la Mecque en espérant vous faire pardonner tous vos crimes avant le jugement dernier. Hélas depuis votre retour vous avez continué vos basses œuvres en tant que petit flic-menteur, ministre, ambassadeur et conseiller en mensonges d’Etat. Dans chacune de ces fonctions vous avez été viré sans trop tarder pour incompétence et malhonnêteté ce qui prouve à suffisance que même parmi les loups de Guinée vous n’avez jamais su faire vos preuves. On dit que le mot El Hadj veut dire étranger – ce terme vous sied bien, si seulement vous pouviez vous taire pour toujours et retourner chez vous dans les méandres de l’Inferno de Dante, la Guinée s’en porterait surement mieux !
Au nom de toutes les victimes de l’Etat Guinéen depuis 1958 et au nom de leurs descendants, mes frères et sœurs meurtris pour toujours mais debout en face de vous pour vous ridiculiser chaque fois que vous nous en offrirez le plaisir, je vous exprime toute notre pitié pour votre contribution inoubliable à la semaine nationale de la citoyenneté et de la paix. Nous n’attendions pas beaucoup plus venant de vous.
Conakry, le 11 Novembre 2016
AOT Diallo pour la famille de Boubacar Telli DIALLO