Il ne faut pas brûler la case ‘’L’heure est grave ’’. C’est le moins qu’on puisse dire de la situation sociopolitique qui prévaut en Guinée depuis un certain temps. La grève déclenchée par le SLECG (Syndicat libre des enseignants et chercheurs de Guinée) continue de paralyser par endroits le système éducatif, déjà mal en point dans bien des domaines.
Ce lundi 12 novembre 2018, accompagnés dans la rue par leurs élèves, des enseignants grévistes ont tenté de prendre d’assaut les DCE (Direction communale de l’Education) et les DPE (Direction préfectorale de l’Education) de leurs zones respectives pour exiger des autorités le dégel de leurs salaires. Les forces de l’ordre ont eu du mal à les disperser à coups de gaz lacrymogène. Comme il fallait s’y attendre, la circulation et les activités économiques ont été fortement perturbées dans la capitale Conakry. Six semaines après la rentrée officielle des classes, le syndicaliste Aboubacar Soumah et ses camarades du SLECG restent campés sur leur position initiale, à savoir l’ouverture des négociations autour des 8 millions de francs guinéens comme salaire de base pour chaque enseignant. Le gouvernement Kassory, pour sa part, ne cesse de faire comprendre à ses partenaires sociaux qu’il lui est impossible d’accéder à ces revendications salariales que d’aucuns qualifient d’irréalistes.
Sur le plan politique, c’est le bras de fer entre l’opposition et le pouvoir qui commence à prendre une tournure très inquiétante. Les élections locales censées renouveler tout simplement le mandat des conseillers communaux ont plutôt contribué à fragiliser davantage le tissu social. Après des mois de contestations, la Mouvance et l’opposition sont parvenues le 8 août 2018 à la signature d’un accord sur le contentieux électoral. Un accord qui a été bien accueilli par l’écrasante majorité des Guinéens mais dont l’application sur le terrain a posé énormément de problèmes. Les affrontements enregistrés aussi bien à Conakry qu’à l’intérieur du pays en témoignent éloquemment.
Pour protester contre les conditions dans lesquelles les exécutifs communaux ont été installés, l’opposition républicaine a pris unilatéralement la décision d’organiser des séries de manifestations; une façon pour elle de se faire entendre du pouvoir. Mais les journées ‘’ville morte’’ et les marches interdites de ladite opposition ont jusqu’ici été émaillées d’incidents plus ou moins graves. Si l’on n’enregistre pas des morts, ce sont les édifices publics ou privés qui sont détruits par les manifestants incontrôlés.
Le 7 novembre, en marge de la journée ‘’ville morte’’ décrétée par l’Opposition républicaine, deux jeunes ont été tués par balles à Wanindara, dans la commune de Ratoma, présentée à juste titre comme le bastion de l’UFDG. Le lendemain, c’est un jeune policier qui s’est fait battre à mort dans le même quartier de la haute banlieue de Conakry. Selon des cadres et militants de l’opposition, les forces de l’ordre y auraient fait une descente pour ‘’venger’’ le policier tué la veille.
Le vendredi 9 novembre, le ministre de la Justice et trois de ses collègues du gouvernement (Sécurité, Administration du Territoire, Communication) ont animé un point de presse pour annoncer l’ouverture d’une enquête judiciaire pour faire la lumière sur ce qui s’est passé à Wanindara.
Dans l’attente des résultats de ladite enquête, chaque Guinéen, de l’intérieur ou de l’extérieur’’, se doit d’œuvrer à la préservation de la paix et de la quiétude sociale. Les deux bords politiques (Mouvance et Opposition) ont l’obligation d’appeler leurs militants et leurs communicants à la retenue pour ne pas brûler notre case commune qu’est la Guinée.
La presse (audiovisuelle, écrite, en ligne) doit faire preuve de responsabilité dans le traitement de l’information pendant cette période sensible.
Les activistes de la société feraient œuvre utile en offrant leurs bons offices pour rapprocher les positions et éviter à notre pays un saut dans l’inconnu. Le patriotisme doit se traduire au quotidien dans les faits et gestes de chaque citoyen.
IBRAHIMA SORY CISSÉ