Nicolas Sarkozy chez les juges d’instruction pour ses pénalités réglées par l’UMP, trois responsables de sa campagne 2012 en garde à vue dans l’affaire Bygmalion: après son succès aux départementales, l’ex-chef de l’État est de nouveau embarrassé par les enquêtes sur sa dernière présidentielle.
L’ancien chef de l’État est arrivé mercredi peu après 08H00 dans une berline noire au pôle financier de Paris, où il devait être interrogé par les juges, a constaté l’AFP. Son audition avait déjà été plusieurs fois reportée.
Peu après, son ancien directeur de campagne et actuel préfet de Lozère Guillaume Lambert, le député UMP Philippe Briand, qui en était le trésorier, et un avocat de l’UMP, Philippe Blanchetier, ont été placés en garde à vue à l’Office anti-corruption de la police judiciaire, à Nanterre (Hauts-de-Seine).
L’enquête sur les pénalités, dans laquelle est entendu l’ex-président, porte sur le paiement par l’UMP, fin octobre 2013, des sanctions infligées à Nicolas Sarkozy pour le dépassement du plafond – 22,5 millions d’euros – de ses dépenses durant la campagne perdue en 2012.
Le rejet des comptes avait privé l’UMP du remboursement de plus de dix millions de frais de campagne. Mais le Conseil constitutionnel avait aussi ordonné au candidat Sarkozy la restitution à l’État d’une avance forfaitaire de 153.000 euros et lui avait infligé une pénalité de 363.615 euros, correspondant au dépassement constaté.
Or, le fait pour l’UMP d’avoir pris en charge ces frais peut constituer un abus de confiance, car les pénalités visaient le candidat lui-même et l’argent du parti aurait ainsi été détourné à son profit. A l’époque, pour se renflouer, l’UMP, très endettée, avait lancé une grande souscription auprès de ses militants, le « Sarkothon ».
– Déjà mis en examen dans une autre affaire –
Les juges d’instruction ont déjà mis en examen pour abus de confiance l’ex-patron de l’UMP Jean-François Copé et sa trésorière de l’époque Catherine Vautrin. Ils ont aussi placé sous le statut de témoin assisté l’ancienne directrice des ressources du parti, Fabienne Liadze, et Me Blanchetier.
C’est notamment sur la foi de l’analyse de ce juriste de l’UMP que le parti avait pris en charge les pénalités. Mais en juin 2014, cet avis avait été contesté par un autre avocat, mandaté par le trio Fillon-Juppé-Raffarin qui venait de prendre la tête de l’UMP à la place de Jean-François Copé, contraint à la démission par l’affaire Bygmalion.
Dans la foulée, les commissaires aux comptes de l’UMP avaient signalé les faits au parquet de Paris, qui avait ouvert une enquête. Début décembre, revenu à la présidence de l’UMP, Nicolas Sarkozy s’était résolu à rembourser la somme de 363.615 euros, un acte qui n’a pas arrêté le cours de l’enquête.
Les juges ont la possibilité de mettre en examen l’ancien chef de l’État ou de le placer sous le statut intermédiaire de témoin assisté. Depuis qu’il a quitté l’Élisée, Nicolas Sarkozy et certains de ses proches ont déjà été inquiétés par plusieurs affaires, qui risquent de devenir des obstacles.
Dans l’affaire Bygmalion, les enquêteurs pensent avoir mis au jour une fraude colossale: ils ont la conviction que l’UMP a pris en charge environ 18,5 millions d’euros de frais de meetings en 2012, alors que ces dépenses auraient dû rentrer dans le budget de la campagne.
Nicolas Sarkozy a aussi été mis en examen pour corruption et trafic d’influence actifs dans l’affaire dite des écoutes. Les juges soupçonnent l’ex-chef de l’État d’avoir tenté, avec son avocat Thierry Herzog, d’obtenir des informations couvertes par le secret auprès d’un magistrat en poste à la Cour de cassation dans l’affaire Bettencourt, où il a obtenu un non-lieu. L’enquête a cependant été suspendue en attendant que la cour d’appel se prononce, le 7 mai, sur des requêtes en nullité de procédure.
Nicolas Sarkozy avait mis en cause l’impartialité des juges qui l’avaient mis en examen et dénoncé une « volonté » de l' »humilier » avec sa garde à vue, une première pour un ancien président.
Mercredi, Alain Juppé a souhaité qu’il fasse « prévaloir son bon droit ». « Je n’ai pas de jugement à porter sur la manière dont fonctionne la justice », s’est contenté d’ajouter l’ancien Premier ministre, rival potentiel de Nicolas Sarkozy à droite.
La rédaction