Depuis sa création, Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon n’a eu de cesse – à travers le programme JUSTICE IN GUINEA – de lutter pour que les auteurs présumés de crimes politiques soient traduits en justice et que les victimes soient rétablies dans leurs droits. À maintes reprises, notre organisation a interpellé des organisations des droits de l’homme, les institutions multilatérales de développement et des leaders du monde industrialisé pour qu’ils fassent pression sur le gouvernement guinéen afin d’accélérer la procédure judiciaire sur les crimes contre l’humanité du 28 Septembre 2009, commis sous la direction de Mr. Dadis Camara.
Suite à l’annonce de l’alliance entre le FPDD et l’UFDG, la commission centrale de Pottal-Fii-Bhantal a tenu une réunion extraordinaire pour en examiner les implications. Notre organisation regrette cette alliance qui est une atteinte à la mémoire des victimes des massacres de 2009 dont la plupart sont des militants de l’UFDG. Cette alliance enhardit les criminels et ruine les chances d’éradiquer l’impunité et d’instaurer la bonne gouvernance dans notre pays.
Les circonstances qui entourent la candidature de Mr. Dadis Camara et le récent accord politique révèlent les dangers que l’impunité – érigée en méthode de gouvernement – fait courir à notre pays. Des efforts concertés sont menés au sein de l’administration pour encourager cette impunité dans le but de noyauter le processus électoral.
Mr. Dadis Camara et ses acolytes se sont livrés en 2008 à l’usurpation du pouvoir par la force et la violation du processus constitutionnel. De lourdes peines de prison devraient les sanctionner. Pendant son court règne à la tête de la junte militaire, Mr. Dadis Camara et ses sbires se sont rendus coupables de crimes odieux contre des citoyens innocents avec des vols de biens, des extorsions financières, des tueries de policiers pour subtiliser de la drogue saisie, des démolitions de demeures etc. La responsabilité de Mr. Dadis Camara sur les massacres de 2009 reste entière. Toutes les enquêtes indépendantes l’accusent d’avoir commandité ces crimes imprescriptibles contre l’humanité. Au terme des enquêtes de l’ONU, la junte militaire dirigée par Mr. Dadis Camara mit en place une commission d’enquêtes qui, dans une flagrante moquerie à toute notion de justice, désigna comme seul responsable connu des massacres, Mr. Toumba Diakité.
Les présomptions et les preuves de violations des droits de l’homme et des citoyens guinéens existant à l’encontre de Mr. Dadis Camara sont accablantes. Mais le ministère de l’administration du territoire en charge de réguler la création des partis n’a trouvé aucune objection au fait que de Mr. Dadis Camara puisse se lancer dans des activités politiques en Guinée.
Le principe de présomption d’innocence qui est inscrit au cœur du droit n’est pas fait pour protéger de criminels avérés. Il est fait pour protéger les innocents et prévenir les abus du gouvernement. Toutefois, ce principe a été perverti en outil de noyautage de la justice. Son application sélective est basée sur des visées politiques. En témoignent les nombreux prisonniers politiques qui croupissent dans les prisons guinéennes, dans l’indifférence générale. Poussé à son extrême, le noyautage de la justice a permis à des officiers complices de Mr. Dadis Camara, accusés comme lui de crimes contre l’humanité, de figurer dans le gouvernement de la république, en dépit des protestations répétées des organisations internationales, de victimes et de la société civile guinéenne.
Aux dénis de justice dans notre pays, s’ajoutent des répressions sanglantes. Les assassinats de manifestants exerçant leurs droits civiques se comptent par des dizaines. Des citoyens paisibles ont été massacrés à Womey et à Zogota. Des enfants innocents furent kidnappés et certains moururent de tortures. L’exclusion ethnique a exacerbé les tensions entre citoyens à un niveau dangereux. Les manipulations du dispositif électoral, l’insécurité civile et l’arrogance des dirigeants ont dissout la notion de citoyenneté. Les guinéens sont devenues des proies faciles des rancœurs ethniques que notre culture commune ne peut ni justifier, ni expliquer.
A la grande désolation des observateurs, la Guinée présente aujourd’hui un tableau alarmant : d’une administration gangrenée par des criminels et d’une opposition prête à toutes les compromissions pour accéder au pouvoir. Cette situation est imputable à la culture délibérée d’impunité. La justice et l’éradication de l’impunité restent donc les seuls moyens pour enrayer les risques de chaos qui en résultent. L’escalade ruineuse de compétitions politiques grossièrement et exclusivement fondées sur le facteur ethnique n’est pas une fatalité que les guinéens doivent subir. Les alliances régionales, politiques et d’intérêts sont inévitables et à encourager dans la compétition politique. Mais ils doivent se faire dans le respect des normes de justice. Toute violation de ces normes – au nom de préférence ethniques ou politiques – n’est qu’un arrangement indécent que l’histoire reconnaitra comme tel.
L’impunité est une atteinte aux droits de tous les guinéens, toutes ethnies et toutes opinions politiques confondues. Pottal-Fii-Bhantal s’est toujours employé à éradiquer cette gangrène. En ces temps de compétition électorale, notre organisation en appelle impérativement aux citoyens guinéens pour accentuer la pression sur les leaders politiques, religieux et de la société civile pour le combat sur le front de la lutte contre l’impunité.
Nous demandons encore une fois, à la CPI de prendre en charge les enquêtes sur les crimes de 2009. Nous invitons les instances internationales de bonne gouvernance ainsi que les gouvernements démocratiques à faire pression sur les autorités guinéennes afin de mettre un terme aux dénis répétés de justice en Guinée. A défaut, les élections ne seront jamais transparentes dans le pays et il sera impossible de garantir l’acceptation de leurs résultats aux populations.
Du fait des élections prochaines dans un contexte d’épidémie d’Ébola, l’opinion mondiale porte son attention sur notre pays. Aux citoyens guinéens – aux cadres, dirigeants politiques, leaders sociaux et militants de la société civile en particulier– il incombe de comprendre que la bonne volonté de la communauté internationale ne pourra pas sauver la Guinée du chaos. Il est de leur devoir de prendre à bras le corps la lutte contre l’impunité qui est la condition première de l’érection d’un état de droit. Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon réitère son appel à tous les citoyens à se joindre – sous des formes qu’ils sont libres de définir – au programme JUSTICE IN GUINEA pour mener ce combat.
Encore une fois nous assurons toutes les victimes de notre soutien sans faille. Nos prières vont pour le repos des âmes de tous les citoyens morts de la répression dans notre pays.
La commission Centrale de Pottal-Fii-Bhantal Fouta-Djallon
Ampliations:
- ICC
- Ministre de la justice de la Guinée
- Ministre des droits de l’homme de la Guinée
- FIDH
- OGDH
- Associations Guinéenne des victimes : AVIPA, AFADIS, AGORA, Camp Boiro
- Human Right Watch
- Human Right First
- GLOBAL JUSTICE STATE DEPARTMENT