La réélection d’Alpha Condé à la tête de l’Etat guinéen pose en même temps un certain nombre de questions dont celle de sa succession n’est pas la moindre. A cette dernière il faut rattacher celle de la survie du RPG-Arc-en-ciel, le parti qu’il a fondé et qui l’a conduit au pouvoir. Le RPG-AEC survivra-t-il à Alpha Condé? La question mérite d’être posée, quand on sait qu’en général, en Afrique et en Guinée en particulier, les partis au pouvoir disparaissent avec leurs fondateurs. C’est le cas du PDG-RDA (d’Ahmed Sékou Touré) et du PUP (de Lansana Conté) en Guinée.
Alpha Condé n’a jamais caché son ambition d’être le Mandela de la Guinée. Il ne rate jamais une occasion pour le dire. Il est allé jusqu’à rajouter le nom « Arc-en-ciel » au RPG, quand celui-ci s’est ouvert aux autres partis pour constituer la formidable alliance qui allait le conduire au pouvoir, comme pour marcher sur les pas de Nelson Mandela qui a été le premier président noir de l’Afrique du Sud devenue « la nation arc-en-ciel », selon la belle formule de Mgr Desmond Tutu. Tout une symbolique qui ne trompe pas.
Le pari est maintenant de faire du RPG-AEC un parti qui survive à son fondateur, comme l’ANC en Afrique du Sud, qui a encore de beaux jours devant lui, malgré la disparition de la génération des Mandela et autres Govan Mbeki et Walter Sisulu. C’est aujourd’hui le parti dominant qui recueille autour de 60% des voix. En tout cas, la construction du siège du parti est déjà un signe qui prouve qu’il se situe dans la durée. Aucune force politique ne l’avait encore fait en Guinée.
Si le Congrès national africain (ANC) est arrivé au pouvoir en Afrique du Sud, après 82 ans de lutte (il est né en 1912, soit cinq ans avant la naissance Mandela), le RPG (créé en 1991) lui, est arrivé au pouvoir en 2010. Cependant Alpha Condé, son fondateur, avait derrière lui une carrière politique de plus de quarante ans.
A qui va-t-il confier le parti, pour que celui-ci en fasse un parti réellement Arc-en-ciel, ouvert aux autres forces politiques et qui, surtout, domine la vie politique guinéenne? Là est la question. Alpha Condé, qui rêve de rentrer dans l’Histoire par la grande porte, s’attellera pendant son second mandat à cette tâche très difficile que ne lui faciliteront certainement pas les caciques du RPG pur et dur et aussi ceux qu’il appelle les « RPCé ».
Pour que le parti réussisse cette prouesse politique de rester au pouvoir en étant un parti dominant, même après le départ d’Alpha Condé, au terme de son second mandat, il faut ratisser large en transformant l’essai de la dernière présidentielle; c’est-à-dire continuer à améliorer son score dans les bastions de l’opposition. La tendance actuelle est bonne et augure de bons résultats pour le futur. Décommunautariser totalement le parti et en faire le parti le plus national possible. C’est ce qui garantira sa pérennité. Les autres partis devraient eux aussi s’en inspirer. Pour définitivement sortir du syndrome que constitue la « fracture ethnique ».
Daouda Tamsir Niane