La Guinée Bissau est secouée depuis août 2015 par une crise latente. Le président guinéen Alpha Condé, désigné médiateur dans la crise, y met aussi du nerf pour rapprocher les positions. Pour mieux cerner la situation dans ce pays frontalier, nous avons joint samedi 10 septembre dernier [peu avant la visite des chefs d’Etat guinéen et sierra-léonais à Bissau] Aristides Ocante Da Silva, ministre d’Etat de la présidence du conseil des ministres et porte-parole du gouvernement bissau-guinéen. Pour Da Silva, « ce n’est pas vraiment une crise politique en Guinée Bissau. C’est plutôt un blocage politico-institutionnel au niveau de l’Assemblée nationale populaire. » Réaction…
« On parle un peu partout de la crise politique. En réalité, ce n’est pas vraiment une crise politique. C’est plutôt un blocage politico-institutionnel au niveau de l’Assemblée nationale populaire. C’est-à-dire qu’il y avait tout un processus de nomination d’un gouvernement assis sur une belle majorité à l’Assemblée nationale populaire. Il y a une recomposition de la majorité. C’est sur cette base que le président [de la République José Mário Vaz, ndlr] a nommé un nouveau Premier ministre [Baciro Dja] et un nouveau gouvernement. Ça été le résultat du fait que le PAIGC [Parti africain pour l’indépendance de la Guinée et du Cap-Vert], le parti qui avait gagné les élections, a expulsé 15 de ses députés. En expulsant les 15 députés, le PAIGC a perdu la majorité au Parlement. Il a fait recours -c’est tout à fait normal- à la Cour suprême. La Cour suprême a tranché, donné son verdict en disant que ces députés par le simple fait qu’ils ont exprimé leurs voix à l’Assemblée nationale populaire ne peuvent pas perdre leur mandat. Ça été clair là-dessus. Le gouvernement a été formé avec une nouvelle majorité dont les 15 députés plus le 2e parti à l’Assemblée avec 41 députés plus un parti avec un député. Donc, une majorité de 57 députés. Le gouvernement a été formé, les 15 font partie. Ce qui se passe, finalement, ils [les députés du PAIGC] disent que le gouvernement n’est pas constitutionnel, etc. Donc, quand vous dites que le gouvernement n’est pas constitutionnel, il n’appartient qu’à la Cour constitutionnelle de se prononcer. Une fois de plus, la Cour constitutionnelle de la Guinée Bissau s’est prononcée en disant que le décret du président de la République est constitutionnel. Aussi bien sur la forme que sur l’aspect matériel. Après ça, le PAIGC a été invité à intégrer le gouvernement, il a refusé. Ils disent qu’ils n’entrent pas. Maintenant, ils veulent qu’on recompose tout et on recommence. C’est ça le problème. Et qu’est-ce qu’Ils font alors ? Ils passent par le président de l’Assemblée nationale, un militant du PAIGC comme moi. Ils l’incitent à bloquer la convocation d’une session extraordinaire pour discuter et voter le programme du gouvernement. Il y a donc un blocage au niveau du président de l’Assemblée nationale populaire. Alors que la constitution de la République, le règlement intérieur de l’Assemblée disent qu’il [président de l’Assemblée nationale] est obligé de convoquer une session extraordinaire quand il s’accorde avec le Premier ministre sur une date pour la tenue de la session. Le gouvernement a remis son programme. Donc, il appartient à l’Assemblée de marquer la date. C’est ce que l’Assemblée refuse de faire. C’est ça le problème ! ».