Le président Alpha Condé a, dans sa présentation de vœux du Nouvel an à ses compatriotes, dans la soirée du 31 décembre dernier, dressé le bilan annuel des actions entreprises par son gouvernement durant l’an un de son second et dernier quinquennat. Et contrairement à l’autosatisfaction dans laquelle le chef de l’Etat semble verser, au terme d’une année qu’il considère comme « réussie », maints observateurs y voient eux, plutôt un bilan en demi-teinte.
A peine rentré d’une visite de travail qu’il venait d’effectuer en Turquie, à la tête d’une importante mission constituée essentiellement d’hommes d’affaires guinéens, le président de la République a livré son discours de vœux du nouvel an à ses compatriotes le 31 décembre dernier. Cette allocution retransmise en direct par la télévision d’état, a été consacrée presqu’entièrement au bilan du président Alpha Condé. Le chef de l’Etat a profité de son intervention pour renouveler son engagement à poursuivre « les actions visant à améliorer les conditions de vie des populations et à renforcer l’unité nationale. Un objectif qui va de pair avec le souci de mettre la Guinée sur le chemin de l’état de droit, de la démocratie et de la paix », selon lui.
Des réformes macroéconomiques
Parmi les actions citées par le chef de l’Etat, il a fait mention « des réformes économiques et l’assainissement des finances publiques menés par son gouvernement, et qui ont contribué à la normalisation des relations avec la Banque mondiale et le Fonds monétaire international (FMI). Avec le FMI, nous avons conclu le 28 octobre 2016, la huitième et dernière revue du programme économique par un accord au titre de la facilité élargie de crédit, pour la première fois dans l’histoire économique de notre pays. Cette décision traduit sans aucun doute, la confiance de cette institution à notre égard », s’est réjoui Alpha Condé.
Pour lui, cet accord est accompagné par l’adoption d’un Plan national de développement économique et social qui permettra une mobilisation optimale de notre potentiel de croissance.
A cela s’ajoute « le développement du partenariat public-privé avec la réorganisation du secteur privé et l’évolution des activités du secteur informel avec lequel, le gouvernement a instauré des relations de confiance en matière de fiscalité. Notre Etat a mis en place, une nouvelle politique de mobilisation des ressources nationales et de renforcement de sa capacité d’absorption par l’Etat, des capitaux, grâce à l’amélioration du régime fiscal », a rappelé le président.
Encourager la production et la consommation locale
« Nos efforts s’attellent aussi à la restructuration de l’économie rurale, et d’une manière générale au soutien au monde agricole. Cela permettra de consolider notre autosuffisance alimentaire, à travers l’appui aux cultures de rente, et la réalisation d’infrastructures d’aménagement et de maitrise de l’eau pour l’agriculture. Dans ce même ordre d’idée, nous avons instauré également les bases de l’élevage intensif et du développement du secteur de la pêche. Depuis le 10 octobre 2016, notre pays est en conformité avec les normes de l’Union européenne en matière de pêche. La Guinée a été ainsi retirée de la liste noire des pays qui ne coopéraient pas à la lutte contre la pêche illicite et non légale », a souligné Alpha Condé.
Il va ensuite énumérer des projets entrepris par son gouvernement dans le domaine minier, un des principaux secteurs porteurs de croissance de l’économie nationale.
A ce niveau, un « cadre propice à l’investissement a été créé, à commencer par la revue des titres, conventions et accords lancés en 2012 et clôturé en 2016. Il existe désormais un guichet unique chargé du suivi des projets, ainsi que de l’amélioration des connaissances géologiques et du renforcement des capacités de l’administration minière. »
Quant au domaine des transports, des projets ont vu le jour, comme l’extension de la zone Est du port de Conakry et la construction de nouveaux ports et usines de traitement de la bauxite dans la région de Boké. En matière d’énergie, le lancement de la construction du barrage de Souapiti d’une capacité de plus de 450 mégawatts et la construction d’autres barrages, comme ceux de Koukoutamba et des barrages régionaux prévus à Kogbedou et Farankonedou qui vont permettre de desservir la Haute Guinée et la Guinée forestière. Tels sont entre autres les actes posés par le gouvernement de la troisième république.
Le président dit miser surtout sur la valorisation des ressources humaines le décollage économique de son pays. « Il est temps de consommer ce que nous produisons. Et de produire ce que nous consommons. » La fameuse formule qu’il cite au gré de ses discours.
Rompre avec la mauvaise gouvernance
L’autre sujet évoqué par le président dans son message de vœux, concerne la modernisation de l’administration publique. Il a indiqué à ce niveau que «la Guinée est engagée dans la modernisation de son administration. Nous devons nous débarrasser de certaines habitudes acquises, combattre le manque de rigueur dans la gestion de la chose publique.
A cet effet, j’ai instruit le gouvernement à prendre toutes les dispositions nécessaires en vue de rompre définitivement avec la mauvaise gouvernance administrative », a-t-il mentionné.
C’est dans cette optique que des mesures pour le pointage des agents de la fonction publique ont été renforcées pour mettre fin « à l’absentéisme chronique de certains agents, en cette période d’entrée de la nouvelle grille indiciaire des agents de l’Etat… »
Alpha Condé a aussi menacé de sévir désormais contre la prévarication. « Tous les agents de l’Etat, qui dans leurs fonctions s’affranchiraient de ces règles de droit ou procèderaient à une utilisation privative des ressources de l’Etat, devront rendre compte », a-t-il promis.
A l’occasion de cette présentation de vœux à la Nation, le chef de l’Etat n’a pas manqué de rendre hommage aux acteurs politiques. Un geste qui vise sans doute à renforcer l’élan de décrispation dans lequel le pays s’est inscrit depuis la rencontre survenue le 1er septembre dernier entre le président et son principal opposant Cellou Dalein Diallo.
« Je tiens tout précisément à féliciter la classe politique pour son sens élevé de l’intérêt national qu’elle a manifesté tout au long du dialogue politique parachevé par un accord signé le 12 octobre 2016. Ce nouveau climat politique permettra aussi, j’en suis convaincu, d’organiser dans la confiance et la sérénité les prochaines élections locales », a déclaré le chef de l’Etat.
Pour finir, Alpha Condé a promis que son gouvernement va poursuivre le programme de développement appelé « plan de relance et de résilience Post-Ebola », qui bénéficie du soutien des partenaires internationaux. Un plan qui s’articule autour de plusieurs axes dont « la stabilisation de l’économie nationale, le renforcement du système de santé du pays, l’autonomisation des femmes et des jeunes, l’énergie, l’agriculture et la construction d’habitats sociaux. »
Ce discours de présentation de vœux qui a pris l’allure d’un discours bilan, n’a pas l’air d’avoir séduit les citoyens de façon générale. Les commentaires qui en découlent dans la cité sont parfois désobligeants. Preuve que le président de la République, a moins d’adhérents dorénavant à son programme de société. De quoi compliquer sa tentative de reprendre la main, en prélude aux élections communales prévues pour cette année 2017.