Au Burkina Faso, une caravane de sensibilisation contre le tabagisme sillonne depuis le 30 mai les rues de la capitale Ouagadougou. Pendant 48 heures, les membres de l’association « Afrique contre le tabac » (Aconta) montreront les conséquences du tabac sur la santé à travers des images et les explications des médecins. Selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), plus de 4 000 Burkinabè meurent chaque année du tabagisme.
Avec un char et des affiches présentant quelques-unes des conséquences du tabagisme sur la santé, la caravane de sensibilisation de l’association « Afrique Contre Le Tabac » (Aconta) sillonne les artères de la capitale bukinabè depuis mardi.
« C’est une occasion pour nous de faire le tour de la ville de Ouagadougou, d’échanger directement avec la population, de sensibiliser, de leur faire savoir que la consommation du tabac est source de problèmes, explique Salif Nikiema, le coordonnateur d’Aconta. Aujourd’hui, les chiffres donnent plus de 4 400 décès par an au Burkina Faso. C’est énorme. »
En plus des multiples maladies liées au tabagisme, plus de 50 milliards de francs CFA (70 millions d’euros) sont dépensés par an pour l’achat du tabac au Burkina Faso, selon le docteur Ould Sidi Mohamed, consultant dans la lutte contre le tabagisme.
« On a vu des témoignages de jeunes gens qui ont commencé à fumer depuis 15, 20 ou 30 ans, raconte-t-il. Il y en a un dont on a estimé les dépenses à plus de 12 millions de francs CFA, alors que si vous le voyez lui-même, il ressemble toujours à un clochard. C’est pour cela qu’on fait le plaidoyer pour que le Burkina Faso maintienne la pression pour pouvoir mettre les images sur les paquets de cigarettes. Ces images vont beaucoup aider les jeunes à ne pas rentrer dans le tabagisme. Cela va aider les jeunes qui ont déjà commencé à pouvoir arrêter de fumer. »
Les organisateurs de cette caravane recueilleront le soutien des populations et leurs signatures à travers une pétition pour le respect de la loi contre le tabagisme au Burkina Faso.
L’Afrique, nouvel eldorado du tabac
Dans le monde, 7 millions de personnes meurent chaque année des suites d’une maladie liée au tabac. Face à ce fléau sanitaire, les pays riches ont riposté en adoptant des réglementations.
Conséquence : les multinationales du tabac se tournent de plus en plus vers les pays en développement, en Afrique notamment, où à ce jour seuls quelques pays, comme le Sénégal ou le Tchad, ont mis en place une législation dans ce domaine. Résultat : la consommation de tabac a augmenté de 70 % entre 1990 et 2010 sur le continent.
Professeur de santé publique, Gérard Dubois a étudié les stratégies des industriels du tabac pour étendre leur influence. « L’industrie du tabac se répand avec avidité sur le continent africain, en utilisant tous les moyens qu’elle utilisait il y a quelques décennies en Europe ou aux Etats-Unis. Il s’agit de vendre absolument partout, parfois à l’unité et y compris à la sortie des écoles. Elle veut absolument maintenir ses bénéfices par la publicité, le sponsoring, en s’opposant avec force à toute taxation de ses produits ou n’acceptant que des taxations symboliques. »
Par ailleurs, poursuit-il, « l’industrie va aller jusqu’à mettre en garde contre la contrebande de cigarettes, si jamais les prix sont trop élevés, alors que l’on sait pertinemment que c’est cette industrie elle-même qui au plus haut niveau organise la contrebande de ses produits. En organisant la contrebande, elle casse les velléités de taxation. C’est un système qui parfois va jusqu’à l’emprise sur certains Etats, avec une industrie qui n’a pour horizon que ses intérêts financiers. »