Le député uninominal de Dixinn estime que ses années passées au sein de l’UFDG, n’ont été qu’un gachi dans sa carrière politique. Pas satisfait du dernier arrêt de la cour constitutionnelle, Aboubacar Soumah donne son avis et évoque avec nous d’autres aspects de l’actualité notamment l’augmentation en vue du salaire des parlementaires et le vote d’un régime fiscal et douanier jugé trop avantageux pour FRIGUIA.
Lisez !
Mosaiqueguinee.Com : Commençons par l’arrêt de la Cour constitutionnelle qui valide partiellement le projet de Code électoral amendé. Dites-nous ce que vous en pensez !
Aboubacar Soumah : Je ne souhaiterais pas commenter une décision de justice, mais je crois que concernant le point 2 de l’accord, l’arrêt de la cour constitutionnelle est muet dessus. On dirait que les magistrats qui composent cette cour n’ont pas vu ce passage. Or, nulle part dans la constitution il n’est dit que nous devons faire le choix des conseils de quartier et de district, il a été dit qu’il doivent être élus. Cela a été la pomme de discorde entre ceux qui veulent que le peuple décide de son destin et ceux qui veulent prendre le pays en otage.
Mosaiqueguinee.Com : lequel des deux camps est victorieux, étant entendu que la Cour a estimé , en quelque sorte, que cela n’est pas anticonstitutionnel ?
Aboubacar Soumah : Non, elle n’a même pas touché ce point précis, l’alinéa 2 de l’article 84 du code électoral. Or, tout le bruit, toute la mobilisation nationale a été faite autour de ça. La Cour aurait pu donner un avis dessus. Il l’ont fait peut être par méfiance, mais j’avoue que ce point est anticonstitutionnel, il ne sert absolument à rien d’aller dans une école de magistrature pour le savoir, lisez la constitution guinéenne de 2010 et lisez cet accord ethno-politique du 12 octobre.
Mosaiqueguinee.Com : Si on renvoyait ce texte en seconde lecture, continuerez-vous à vous opposer au principe de nomination des chefs de quartier ?
Aboubacar Soumah : Qu’on envoie ce texte ou pas en seconde lecture, nous qui nous disons que nous voulons défendre la République, nous feront une mobilisation pour ne pas que les gens viennent nommer des personnes pour gérer des districts et les quartiers dont ils ne connaissent ni la langue ni les réalités.
Mosaiqueguinee.Com : Quelques mois après votre démission de l’UFDG, suivie de la création de votre propre formation politique, regrettez-vous votre démarche ?
Aboubacar Soumah : Sur l’honneur, je regrette d’avoir fait tout ce temps à l’UFDG. Jusqu’ici, je fais mon assemblée générale tous les Samedi, contrairement à des grands partis. J’ai vu des gens qui ne me saluaient même pas lorsque j’étais à l’UFDG, venir vers moi. J’avoue que j’ai compris que j’ai mis un temps inutile sur le plan politique.
Mosaiqueguinee.Com :Vous avez également surpris ceux qui s’attendaient à une alliance entre vous et le parti au pouvoir !
Aboubacar Soumah : Certains Guinéens ne me connaissent pas, malheureusement. Je ne dis pas la vérité, je dis ce que je pense. Cela peut être la vérité ou pas. Avant de démissionner à l’UFDG, j’avais dit que je ne serai désormais derrière un leader parce que je suis déçu. Les gens ne font pas ce qu’ils promettent, ils font le contraire de ce qu’ils disent. Ceux qui disent qu’ils se battent pour le pays, ils se battent pour une cause ethnique ou pour un petit groupe.
Mosaiqueguinee.Com : Donc vous n’avez toujours pas envisagé votre appartenance à la mouvance présidentielle ?
Aboubacar Soumah : Cela ne sera même pas envisagé. Le Président m’a reçu deux fois, lui et et moi avons échangé. Je lui dit que s’il veut m’aider, c’est dans la mise en place de ma propre formation politique.
Mosaiqueguinee.Com : Il n’a rien demandé en contrepartie ?
Aboubacar Soumah : Absolument rien ! Contrairement à tout ce que le comité de diffamation mis en place sous la présidence de Hadja Halimatou Dalein Diallo a diffusé en disant que j’ai perçu 6 milliards, que je devais être nommé ministre… Moi je ne suis pas ennemis de la nation. Si le Pr. Alpha Condé m’appelle aujourd’hui pour me nommer à un poste où je pense que je peux apporter ma modeste contribution dans l’amélioration des conditions de vie des populations guinéennes, j’accepterais. Combien de fois Abdoulaye Wade, en tant qu’opposant, a appartenu au gouvernement de Diouf ?
Mosaiqueguinee.Com : Est ce qu’on ne vous fait pas payer parfois le prix de vos positions souvent gênantes dans les débats à l’Assemblée nationale ?
Aboubacar Soumah : On me prive de tout à l’Assemblée. Depuis que j’y suis, je n’ai jamais bénéficié d’une mission, alors que d’autres députés en ont eu 6 fois. Même lorsque je suis invité par des institutions, je n’ai jamais eu l’ordre de mission, à plus forte raison les moyens qui peuvent être mis à ma disposition en tant que député. Alors qu’il est prévu dans notre budget, que chaque député puisse faire au moins deux missions à l’intérieur du pays et deux autres à l’extérieur. C’est à cause de nos positions politiques à l’hémicycle.
Mosaiqueguinee.Com : Parlons du nouveau régime fiscal et douanier de FRIGUIA, que vous avez critiqué lors de son vote à l’Assemblée, expliquez-nous pourquoi vous vous êtes opposé à ce texte.
Aboubacar Soumah : La société COBAG (Dian-dian) et RUSAL sont juridiquement distinctes. La société COBAG s’est engagée à construire une usine de transformation de l’alumine avec une capacité qui aurait triplé celle de FRIGUIA. Une usine à la pointe de la technologie, comment voulez-vous, en tant que patriote, élu du peuple, qu’on aille remplacer la construction de cette nouvelle usine par la rénovation d’une usine qui date des années 60 ? Même rénovée, elle n’aura pas une durée de vie dépassant 10 ans. Après ça, on nous envoie un régime fiscal et douanier spécial pour cette société (Rusal).
Elle ne paie absolument rien à la Guinée. Un régime fiscal qui viole toute les dispositions des codes minier et douanier. Même à la Caisse Nationale de Sécurité Sociale, les expatriés Russes ne verseront rien.
Mosaiqueguinee.Com : Ceux qui ont défendu le texte parlent de la misère des gens de Fria qu’il faut voir pour relancer FRIGUIA.
Aboubacar Soumah : Alors pourquoi ils ont fermé l’usine ? C’est pourquoi moi qui suis devant vous, et 80 autres députés, avons fait une pétition pour un contrôle de l’action gouvernementale, pour savoir qui a vendu Friguia ? A qui cela a profité ? Pourquoi la convention de la SMB n’est pas passée à l’Assemblée nationale ? Pourquoi il y a une soixantaine d’entreprises à Tougué, Télimélé et Boké ? Par quels moyens elles se sont installées sans que leurs conventions ne passent à l’Assemblée nationale ? Forécariah mining, même le ministre d’alors, M. Kerfalla Yansané, ne savait pas la quantité exportée.
On a déposé cette pétition sur le bureau du président de l’Assemblée. Jusqu’ici, il y a un refus catégorique de mettre en place cette commission alors que le contrôle de l’action gouvernementale est l’un des rôles d’un député. C’est pourquoi je dis que c’est la législature la plus mauvaise que la Guinée n’a jamais connue.
Mosaiqueguinee.Com : On dit que vous êtes sur le point de doubler votre salaire, vous députés. C’est quand même scandaleux lorsqu’on fait référence à la précarité dont les Guinéens souffrent. Accepterez-vous cela, vous personnellement ?
Aboubacar Soumah : Je prie le bon Dieu que le 29 juin nous trouve tous en vie, vous verrez que je voterai contre ! Pour votre information, jusqu’à l’heure où nous parlons, moi je n’ai pas reçu une copie de ce soi-disant règlement intérieur. C’est un groupe de députés des Libéraux démocrates, du RPG et autres qui ont fait ce texte. Même le Président de la Commission des lois, jusqu’à la dernière plénière, n’était pas en possession de ce texte. C’est pour vous dire jusqu’où le bas blesse.
Depuis que je suis à l’Assemblée nationale, je n’ai qu’un seul passeport alors que d’autres députés en ont jusqu’à sept. Allez à Ecobank, informez-vous et regardez la liste des députés ayant déposé des dossiers pour des passeports diplomatiques, vous verrez que certains ont déjà pour eux, pour leurs enfants et pour leurs épouses…. Comment voulez-vous que nous prennions 30 millions alors que le salaire d’un professeur d’universités, de hiérarchie A, n’atteint même pas les 3.500.000 francs guinéens ? Sommes nous des représentants du peuple ?
Lorsque nous aurons ce document, nous allons l’apprécier. Comme toujours, j’essayerai de me distinguer. Si ça va dans le sens de faire en sorte que l’Assemblée soit gérée de façon beaucoup plus responsable, je voterai objectivement. Si ce n’est pas le cas, même si je suis seul, je voterai contre. Comme je l’ai fait lorsqu’il s’est agi de voter le code électoral amendé ou lors de l’adoption du nouveau régime fiscal et douanier de FRIGUIA.
Interview réalisée par Thierno Amadou M’Bonet Camara