Il y a 16 ans, les Américains se réveillaient avec l’horreur d’un attentat au cœur de New York, l’attentat le plus sanglant jamais commis aux Etats-Unis avec près de 3.000 personnes disparues dans l’effondrement des tours du World Trade Center.
Un samedi à Times Square. Une foule de toutes nationalités se bouscule sur cette place entourée de gratte-ciels aux néons géants, parmi les plus célèbres au monde.
Quatre voitures de police sont positionnées au milieu, et les îlots réservés aux piétons sont entourés de petits poteaux pour bloquer tout véhicule qui voudrait percuter la foule.
« Je n’aime pas venir dans ce genre d’endroits », explique doucement Sue Garcia, une kinésithérapeute de Brooklyn. « Ou dans n’importe quel endroit où il y a eu des incidents répétés – la peur refait surface ».
La peur de l’attentat. La peur d’un nouveau 11 septembre 2001, l’attentat le plus sanglant jamais commis aux Etats-Unis avec près de 3.000 personnes disparues dans l’effondrement des tours du World Trade Center.
Garcia, 33 ans aujourd’hui, était au lycée, à Brooklyn, quand les avions ont plongé dans les tours jumelles. Elle les a vues brûler puis s’effondrer, et a marché jusque chez elle, comme des centaines de milliers de New-Yorkais puisque le métro avait été arrêté.
« J’étais là, j’ai vu ce qui s’est passé et je l’ai revu encore et encore, je ne tiens pas à y penser », dit-elle.
Mais elle ne peut s’empêcher d’y songer à chaque mention à la télé, « à chaque fois que j’entends un avion vrombir au-dessus de ma tête », dit-elle. Ou en attendant sa sœur à Times Square, « le carrefour des mondes » qui incarne tant l’effervescence new-yorkaise qu’il paraît la cible idéale.
Frôlé la catastrophe
Par deux fois ces dernières années, l’endroit a frôlé la catastrophe. En mai 2010, la police a retrouvé une voiture bourrée d’explosifs placée pour faire un carnage.
Le 18 mai dernier, un ex-militaire mentalement perturbé a percuté délibérément avec sa berline 23 piétons, tuant une jeune touriste américaine.
Seize ans après le 11 septembre, les poussées d’angoisses comme celles de Garcia font partie des stigmates des New-Yorkais.
Pour ceux qui ont perdu un proche dans la catastrophe ou y ont échappé de justesse, la date-anniversaire peut être « la plus redoutée » du calendrier et le syndrome post-traumatique persister à jamais, explique Charles Strozier, psychanalyste et auteur d’un livre de témoignages sur le 11 septembre.
Pour les autres, dit-il, après le « traumatisme collectif » provoqué par cet attentat « à la dimension apocalyptique », il reste avant tout un « sentiment de vulnérabilité ».
« Dire que les New-Yorkais sont encore +traumatisés+ serait exagéré, mais ils y pensent (…) Ils ont des craintes actives qui se situent juste en-dessous du seuil de conscience, comme la peur d’une bombe dans le métro », explique ce professeur, qui a assisté à l’effondrement du World Trade Center depuis son bureau d’une tour de Union Square.
Beaucoup sont aussi convaincus que, même si les récents attentats ont avant tout visé l’Europe, l’ultra-concentration de New York continue à en faire la cible numéro un.
Cible no1
« Quelle meilleure cible que New York ? » résume Tim Lambert, qui travaille, aujourd’hui comme en 2001, à la pointe sud de Manhattan, près de là où trônait ce symbole de la puissance américaine qu’était le World Trade Center. La ville « est un aimant pour les gens du monde entier. Elle symbolise les libertés que nous avons, l’argent que nous avons. »
Pour cet expert en informatique, ce risque permanent et l’impressionnant déploiement policier qui l’accompagne font désormais partie intégrante de l’environnement.
« Ça me met mal à l’aise mais c’est la nouvelle norme. Le monde change et la menace terroriste fait partie de ces changements », dit-il.
Les autorités de la ville semblent elles aussi avoir la hantise d’une nouvelle attaque.
« Dieu merci, ce n’est pas un acte de terrorisme mais un incident isolé », déclarait fin juin le maire Bill de Blasio, après qu’un ex-employé eut fait un mort et six blessés dans un hôpital du Bronx.
Lors du fauchage de piétons à Times Square mi-mai, le chef de la police, James O’Neill, avouait aussi « avoir pensé au pire. »
Pour protéger ses 8,5 millions d’habitants face à cette peur lancinante, New York se veut exemplaire.
Donner l’exemple
Caméras de surveillance omniprésentes ; consigne « Si voyez quelque chose, dîtes quelque chose » rappelée à tout moment, policiers en uniforme dans tous les lieux publics, New York, forte de 38.000 policiers, met les moyens.
La ville s’est dotée depuis 2001 de sa propre unité anti-terroriste, qui compte aujourd’hui quelque 2.000 homme, avec des émissaires dans plusieurs capitales étrangères, selon Robert Strang, président de l’Investigative Management Group, entreprise new-yorkaise de sécurité.
Des abus ont été révélés, la police ayant notamment un temps surveillé systématiquement les personnes fréquentant les mosquées de la ville. Mais les renseignements sont essentiels et dans l’ensemble, « le travail de la police est un succès », juge Strang.
La capitale financière américaine veut aussi être un modèle dans l’hommage aux victimes.
A chaque attentat en Europe, les autorités transmettent condoléances et offres d’entraide par tweets interposés, tandis que l’Empire State Building s’éteint en signe de deuil.
Témoin de l’impact des attentats du 11 septembre, diffusés en direct dans le monde entier, l’imposant mémorial aux victimes, avec ses deux immenses bassins noirs construits en place des tours jumelles et son musée, est devenu un lieu de recueillement international.
Monique Mol, touriste néerlandaise de 52 ans, est venue s’y recueillir.
« C’est un peu un mémorial aux victimes des attentats du monde entier, » dit-elle. « Comme si les victimes vivaient ici pour toujours, comme les momies dans les pyramides d’Egypte ».
Avec AFP
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