En décembre 2014, Cellou Dalein Diallo se faisait taper sur les doigts par Siaka Barry, alors patron du Programme sectoriel de l’éducation (PSE), pour avoir déclaré que la Guinée est un pays sauvage. Trois ans après, malgré les vives critiques, le chef de file de l’opposition guinéenne a récidivé samedi dernier au siège national de son parti. Pendant que le bel écrit de l’ancien ministre de la Culture résiste encore au temps. Mediaguinee vous le propose…
« La démocratie c’est aussi le droit institutionnel de dire des bêtises » (François Mitterrand)
Chers concitoyens, Il est de coutume, sous les régimes démocratiques, et à l’approche des joutes électorales majeures, que les convulsions les plus spectaculaires s’opèrent avec un réchauffement effréné du climat politique, dû aux confrontations des idées et des projets et surtout au choc des opinions, des idéologies et des convictions, toutes choses propices à la vitalité d’une véritable démocratie. Ce fait est surtout exacerbé dans les anciennes dictatures et dans les démocraties naissantes et fragiles, là où l’élite politique enthousiasmée par la prodigieuse et phénoménale liberté d’expression retrouvée (souvent longtemps confisquée), use et abuse de cette dernière au point de mettre en péril le socle même et les fondements de l’édifice démocratique que le peuple bâtit si patiemment et si laborieusement.
Que notre pays la Guinée soit sujet à de telles convulsions à l’approche des échéances électorales de 2015, n’a rien de surprenant, cela aurait d’ailleurs été un motif de satisfaction et un baromètre sincère de l’embonpoint de notre jeune démocratie si (et c’est là où tout se corse) les assauts répétés de certains politiciens en manque d’inspiration, ne mettaient en péril notre volonté commune et inaliénable de vivre ensemble, ou ne touchaient à ce qu’il y’a de plus fondamental en nous en tant que peuple : notre dignité.
Or, c’est dans ce registre que se situent les deux récentes sorties aussi hasardeuses que dangereuses du maitre-à-penser et tout-puissant gourou de l’UFDG, M. Cellou Dalein Diallo, d’abord à Chicago (en aout passé), puis la semaine dernière à Brescia en Italie. Autant le discours de Chicago menaçait notre nation dans ses fondements en créant une profonde lézarde dans notre bâtisse commune arcboutée sur quatre piliers séculaires, ébranlant ainsi notre cohésion et notre profonde communion, autant le discours de Brescia nous touche dans notre dignité et dans notre fierté de peuple civilisé et émancipé.
Jamais depuis Jules Ferry (et les chantres de la mission civilisatrice coloniale) un leader politique, de surcroit guinéen, n’avait poussé le mépris jusqu’à traiter une nation, sa propre nation, de « pays de sauvages » au grand dam d’un peuple hébété, qu’il courtise pourtant depuis des lustres, pour qu’il lui accorde gracieusement son suffrage souverain, afin d’assouvir une boulimie gargantuesque du pouvoir qui devient si pressante chez lui. Quel paradoxe, quelle outrecuidance !
Que M. Dalein se le tienne pour dit, LA GUINEE N’EST PAS UN PAYS DE SAUVAGES et le peuple guinéen ne saura JAMAIS être un peuple de sauvages, quelle que soit l’acception de cette expression selon les usages et interprétations de l’auteur. Ce peuple guinéen, pour votre gouverne, est le fier héritier des grands bâtisseurs de civilisations flamboyantes, depuis le Ghana antique jusqu’aux puissants royaumes et empires des grands résistants à nuls autres pareils en Afrique, en passant par le Manding médiéval, le Fouta théocratique et les brillantes monarchies côtières et forestières.
Ce peuple que vous affublez aujourd’hui du terme péjoratif « sauvage », perpétue à l’envi, la lignée des noms illustres, intemporels et immortels tels que Soundiata Kéita, Almamy Ibrahima Sory mö Timbo, Samory Touré, Bocar Biro Barry, Dinah Salifou, N’Zébéla Togba, le Waliou de Gomba et autres stratèges politiques, grands tribuns et bâtisseurs de civilisations devant l’éternel. C’est ce peuple de pionniers et de précurseurs qui a su par son génie libérateur s’émanciper tout seul et sans coup férir du joug colonial, ouvrant ainsi avec courage et fierté la voie de l’indépendance aux autres colonies africaines d’expression française.
Non, Cellou, la Guinée n’est pas « un pays de sauvage » !!! Pour vous en convaincre, arpentez les fières montagnes abruptes du Fouta-Djallon (véritables témoins de hauts faits épiques et historiques), promenez vos regards sur la chatoyante plaine du Manding (refuges d’un peuple conquérants et guerrier), pénétrez en profondeur dans la vierge et insondable forêt des hommes à la parole intègre, explorez les vastes étendues sablonneuses des rivages côtiers aux peuples hospitaliers, partout promenez vos regards sur ce peuple que vous prétendez pouvoir diriger, vous saurez que ce territoire, quels que soient vos ressentiments fondés ou infondés vis-à-vis des dirigeants actuels, quelles que soient les tares que vous imputez injustement à l’appareil étatique actuel, eh bien dis-je, ce pays, notre pays n’a rien de « sauvage » !!!
Le sage nous enjoint de faire attention à nos actes qui pourraient devenir nos habitudes, et de veiller sur ces dernières de peur qu’elles ne se muent en caractères ; eh bien, votre stature d’éternel donneur de leçons, vous fait de plus en plus épouser un caractère paternaliste et hégémoniste, qui, si vous n’y prenez garde, risque de nourrir en vous un faux sentiment de suprématie vis-à-vis de vos propres concitoyens, sentiment fatal à toute carrière politique.
Cellou Dalein lors de son discours d’Italie
Quoiqu’on en dise, l’implacable rendez-vous de 2015 sonne déjà le tocsin de la bataille électorale. Cette bataille (tenez-vous bien) sera dure et rude, tandis que le peuple flegmatique et imperturbable de Guinée recense indistinctement au jour le jour, tous les gestes indigestes des uns, tous les faits et méfaits des autres.
En attendant l’heure du choix souverain, les menaces, intrigues et autres mensonges n’ébranleront aucunement notre foi en une vision, celle qu’incarne le RPG arc-en-ciel, parti d’avant-garde pour la défense des idéaux de paix, d’harmonie sociale et de prospérité pour un changement qualitatif en Guinée.
Aussi gros que soient les mensonges de tous ces vendeurs d’illusions et de chimères, j’en appelle au peuple « civilisé » de Guinée de se souvenir de cette célèbre citation de Georges Clémenceau : « on ne ment jamais tant qu’avant les élections, pendant la guerre et après la chasse ». Vivement 2015 pour mettre fin à la récréation !!!
Vive la belle civilisation guinéenne !!! wassalam !!!
Conakry, le 16 décembre 2014
Siaka BARRY, Secrétaire politique de Section
RPG Arc-en-ciel