L’ambiance de travail dans les équipes du ministère est décrite comme « lourde et particulièrement stressante ». Depuis un an, 14 secrétaires ont quitté leur poste. D’après Matignon, le Premier ministre n’a pas été informé de la situation.
En l’espace d’un an, depuis l’arrivée d’Emmanuel Macron et la nomination du gouvernement, 14 secrétaires ont quitté leur poste à Matignon, le siège du Premier ministre. Des chiffres révélés par l’Expresscette semaine, qui a enquêté sur le malaise du personnel dans les équipes qui entourent Edouard Philippe. Le magazine a eu notamment connaissance des résultats d’un audit réalisé en interne par une société de conseil en entreprise.
Dans le détail, l’hebdomadaire rapporte que le secrétariat particulier d’Edouard Philippe, qui se compose de 4 employés en horaires décalés, a connu 6 départs: 3 personnes ont été écartées, 3 autres sont parties d’elles-mêmes. Au total, une centaine de secrétaires sont mis à disposition des conseillers du ministère. Parmi elles, 8 personnes sont parties ou ont été réaffectées, parfois du jour au lendemain, à un autre conseiller. Certaines ont également quitté le cabinet du Premier ministre pour rejoindre celui d’un des trois secrétaires d’Etat placés sous son autorité.
Remerciée à 21h la veille de ses vacances
Parmi les cas cités, celui de cette secrétaire arrivée à 7h30 pour prendre son poste et écartée à 9 heures. Mais aussi celle qui, à 21h, la veille de ses vacances, s’est entendu dire qu’elle ne reviendrait pas.
Sélectionné pour vous
Mélenchon qui promet « une marée humaine »: « Ça ne nous arrête pas », réa…
« Je n’ai rien à te reprocher mais je crois que tu n’es pas à la hauteur et que tu es trop stressée », lui aurait-on déclaré.
En interne, l’ambiance de travail est décrite comme « lourde et particulièrement stressante », avec son lot d »engueulades ».
Concrètement, le personnel administratif à disposition des politiques est géré surtout par la cheffe de cabinet du ministre, Anne Clerc, une ancienne du groupe hôtelier Accor, qui a travaillé notamment avec Jean-Pierre Raffarin. Vient ensuite la responsable du « bureau du cabinet », qui fait la liaison entre les services administratifs et les politiques. Contactée par l’Express, Anne Clerc ne nie pas l’existence de tous ces départs mais les nuance, en évoquant des personnes recasées ailleurs, ou reparties dans leur service d’origine.
Des mouvements « pas inhabituels » pour Matignon
Contacté par nos soins également, le cabinet du Premier ministre confirme « des changements de postes » mais estime que ces mouvements « sont loin d’être inhabituels en cabinet, notamment en début de quinquennat, tant la charge de travail est intense et les exigences fortes ».
Sélectionné pour vous
Inculpé, Harvey Weinstein quitte menotté le commissariat de New York
« Le rythme de travail est très soutenu, la charge pèse sur les secrétariats », explique-t-elle. « Le travail en brigades induit des pertes d’informations et des bugs. Souvent, celles qui commencent quelque chose le matin n’en voient jamais l’aboutissement, qui est réalisé l’après-midi par d’autres. Cela peut être difficile à supporter », développe pour sa part Anne Clerc.
Matignon insiste aussi sur le fait qu’il s’agit de mouvements sans perte d’emploi ni de salaire.
L’impression d’être « des pions » manipulés selon « l’humeur »
Reste que les résultats de l’audit daté de mars 2018 et consulté par l‘Express parlent d’eux-mêmes. Il croise les réponses de 90% des assistantes et de 40% des conseillers, qui ont été interrogés notamment sur « l’origine des tensions ». Comme le rapporte Matignon, la société de conseil a été mandatée en début de quinquennat, à la demande du cabinet d’Edouard Philippe.
« Décisions prises dans l’urgence, « tâches à effectuer dans l’urgence », figurent en bonne place parmi les réponses. Quant aux assistantes en particulier, elles expliquent êtres « considérées comme des pions que l’on manipule non pas au gré des besoins mais des humeurs de chacun ». Elles regrettent aussi l’absence de « DRH cohérente » et évoquent un sentiment « d’injustice » avec des personnes incompétentes « protégées » et d’autres « très compétentes jetées dehors ».
D’après un représentant du syndicat autonome des personnels des services du Premier ministre, qui a été saisi du problème, Edouard Philippe ignore très probablement les raisons de cette valse des personnels. Ce que confirme son cabinet. En réponse à cet état des lieux, un « plan d’action » a été décidé, comprenant notamment des cycles de formation, et des actions dédiées à « améliorer les conditions de travail des secrétaires », ajoute Matignon, sans plus de précisions.