Le 1er mai dernier, à la faveur de la célébration de la Fête du Travail, beaucoup de Guinéens pensaient, naïvement peut-être, que les différentes structures syndicales de leur pays feraient preuve de responsabilité et de sérieux en proposant au Gouvernement et au Patronat un cahier des doléances réaliste en faveur de leurs syndiqués.
Au palais du peuple, l’on a plutôt assisté à une scène à la fois ahurissante et surréaliste. Les deux camps rivaux de l’USTG (Union syndicale des travailleurs de Guinée) se sont affrontés avec une rare violence, faisant des blessés plus ou moins graves dont le camarade Aboubacar Soumah du SLECG, par ailleurs secrétaire général adjoint de l’USTG.
En se donnant ainsi en spectacle, ces syndicalistes se sont totalement décrédibilisés aux yeux de l’opinion nationale. Par leurs actes irresponsables, ils sont en effet parvenus à nous faire regretter leurs illustres prédécesseurs qui ont marqué d’une pierre blanche leur passage à la tête des centrales syndicales que le pays a connues de son indépendance à ce jour.
Tout le monde le sait, le père de l’indépendance guinéenne, feu Ahmed Sékou Touré, s’est révélé d’abord comme un grand syndicaliste avant de présider aux destinées du pays. C’est l’homme qui a dirigé avec succès la grève des 72 jours pour amener l’administration coloniale française à lâcher du lest dans sa manière de faire. A partir de 2006, face à l’inertie de la classe politique, l’Inter-centrale CNTG-USTG a pris la tête des mouvements de contestation populaire pour réclamer un changement à la fois qualitatif et profond dans la gestion des affaires publiques. Hadja Rabiatou Serah Diallo de la CNTG (actuelle présidente du C.E.S) et feu Ibrahima Fofana de l’USTG (tué dans un accident de la circulation en partance pour Fria) ont été perçus par leurs compatriotes comme des justiciers, des redresseurs de tort. Le régime d’alors finira par accepter de mettre en place un gouvernement de consensus. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts.
Aujourd’hui, nombreux sont les leaders syndicaux qui sont accusés de verser dans la corruption pour s’enrichir indûment sur le dos de la classe ouvrière. Il y en a parmi eux qui ne se battraient uniquement que pour occuper des postes de ministres ou de directeurs de régies financières.
C’est pourquoi, quelque temps seulement après sa prise de fonction en tant que Premier ministre et chef du gouvernement, Dr Ibrahima Kassory Fofana avait émis l’idée d’une refonte du mouvement syndical. Mais cette sortie avait été comprise par certains comme une tentative de remise en question des libertés syndicales. La suite des événements vient de lui donner raison. La refonte du mouvement syndical devient plus qu’une nécessité en Guinée.
IBRAHIMA SORY CISSE