Et si la culture renaissait enfin en Guinée ?
Depuis ma chambre à Bruxelles, les images et les échos qui me parviennent de Guinée me laissent sans voix. Oui, sans voix, mais plein d’espoir. Pour la première fois depuis des décennies, j’ai le sentiment qu’on assiste à un véritable frémissement : celui de la renaissance culturelle d’un pays qui en a tant besoin.
Quand j’entends que la culture fait partie des cinq piliers du projet SIMANDOU 2040, je me dis : enfin. Mais lorsque je vois ces déclarations traduites en actions concrètes, là, je me dis : bravo. Ce que nous voyons aujourd’hui avait tout simplement disparu depuis la fin de la République de Sékou Touré. La culture, autrefois pilier d’identité et de cohésion, avait été reléguée au second plan, réduite au silence par des décennies d’indifférence institutionnelle.
Alors, qu’on ne se méprenne pas : je ne cherche pas à plaire. Je n’ai pas besoin de postes ni de faveurs. Je vis de mon art, et c’est précisément pour cela que je me sens libre de saluer les choses quand elles vont dans le bon sens. Aujourd’hui, je le dis haut et fort : chapeau à la nouvelle équipe gouvernementale, à Moussa Moïse Sylla et son équipe, pour leurs efforts sincères à remettre la culture à sa juste place.
Je félicite également le Président Mamadi Doumbouya, le Premier ministre Bah Oury, et tous ceux qui, dans l’ombre ou la lumière, œuvrent pour que la culture ne soit plus un simple slogan, mais une réalité vivante.
Certes, tout n’est pas parfait. Il reste du chemin. Mais la dynamique est là. Et si, au lieu de tout attendre tout de suite, on leur donnait le temps de poser des fondations solides ?
Faut-il sacrifier la vision à long terme pour cocher des cases à court terme ? Ou faut-il continuer à montrer l’exemple dans cette belle entreprise de reconstruction ?
Je sais que mes mots dérangeront. Mais les faits sont là. Pendant longtemps, j’ai porté des projets culturels, sociaux, enracinés dans notre réalité guinéenne. Des projets qui ont tous été tués dans l’œuf avec la même rengaine : « il n’y a pas d’argent ».
Mais aujourd’hui, surprise : il y en a, semble-t-il, quand la volonté politique suit.
J’ai des preuves. Et ceux qui étaient aux manettes à l’époque le savent très bien.
Alors oui, aujourd’hui, je le redis une fois encore : bravo à ceux qui sont aux commandes. Merci de croire que la culture est plus qu’un divertissement : c’est une arme de construction massive, un levier de développement, une source de dignité.
Et à ceux qui me liront avec scepticisme : je ne vous demande pas d’applaudir. Seulement d’observer. Parce que la culture, enfin, recommence à respirer.
Je demande à tous mes confrères qui ont des projets solides, comme moi, pour la Guinée et qui ont été découragés : revenez essayer à nouveau.
Dès l’avènement de notre confrère Moussa Moïse Sylla à la tête du ministère de la Culture, je suis retourné dépoussiérer ce document de collaboration que j’avais signé il y a longtemps avec ses prédécesseurs. Un projet resté enfermé dans les tiroirs pendant des années, simplement parce que « m’mu é gbéssakhi ».
Parmi eux : le projet de co-management du Ballet National Djoliba. Grâce à cette volonté nouvelle, le Ballet a récemment brillé au Bénin lors de superbes représentations en mars dernier — fruit de la collaboration NAMUN Group / Ministère de la Culture.
Mais ce n’était qu’un élan avorté. J’ai eu l’occasion de porter ou de participer à plusieurs projets d’envergure, qui auraient pu avoir un impact réel sur notre paysage culturel. Le Panafrican Arts Festival, vitrine de la culture africaine à Bruxelles, le projet Music Factory à Conakry, des workshops au Centre Universitaire Mory Kanté de Dubréka, ou encore un colloque sur les nouvelles méthodes d’enseignement du balafon à Gnagassola…
Autant d’initiatives prometteuses, lancées avec foi, mais qui n’ont jamais pu s’épanouir, étouffées par un cruel manque de volonté politique.
Je lance donc un appel à tous les frères et sœurs comme Natu Camara, Alpha Yaya Diallo, LKM, et bien d’autres, qui portent des projets pour la Guinée : venez participer à cette reconstruction culturelle que le projet SIMANDOU 2040 est en train de rendre possible.
Venez tous apporter vos pierres à l’édifice. Le moment est venu.
Par N’FALY KOUYATÉ