Le chef de l’armée zimbabwéenne a adressé lundi une mise en garde sans précédent au parti présidentiel, la Zanu-PF, au pouvoir. De son côté, le parti au pouvoir a accusé le militaire de « trahison » et d' »encourager le soulèvement ».
Tensions au Zimbabwe. Le chef de l’armée zimbabwéenne a adressé lundi 13 novembre une mise en garde sans précédent au parti du président Robert Mugabe, dénonçant vivement l’éviction du vice-président du pays et prévenant que l’armée pourrait « intervenir » si cette « purge » ne cessait pas au sein du parti présidentiel.
Emmerson Mnangagwa, longtemps pressenti comme dauphin du président Robert Mugabe dont il est un des anciens fidèles, a été humilié et démis de ses fonctions de vice-président la semaine dernière, après un bras de fer avec la première dame, Grace Mugabe.
Pour sa part, le parti du président Mugabe a accusé mardi le chef de l’armée de « conduite relevant de la trahison ». Dans un communiqué, la Zanu-PF affirme que les critiques du chef de l’armée sont « clairement destinées à perturber la paix nationale (…) et démontrent une conduite relevant de la trahison de sa part étant donné que cela a été fait pour encourager au soulèvement ».
« L’armée n’hésitera pas à intervenir »
Ce départ forcé d’un des lieutenants de Robert Mugabe a fait éclater au grand jour les rivalités au sein du parti présidentiel, au pouvoir depuis l’indépendance en 1980.
« La purge actuelle qui vise clairement les membres du parti qui ont été engagés dans la guerre d’indépendance doit cesser immédiatement », a martelé lundi le général Constantino Chiwenga en lisant un communiqué devant la presse au quartier général de l’armée, dans une déclaration particulièrement forte.
Environ 90 hauts responsables de l’armée y ont assisté. « Nous devons rappeler à ceux qui sont derrière ces dangereuses manigances que lorsqu’il s’agit de protéger notre révolution, l’armée n’hésitera pas à intervenir », a-t-il menacé.
Cette mise en garde intervient alors qu’Emmerson Mnangagwa, 75 ans, a fui le Zimbabwe pour l’Afrique du Sud, selon ses proches.
Mnangagwa, qui a reçu le soutien des anciens combattants de la guerre d’indépendance au Zimbabwe, entretient des liens étroits avec les militaires, étant à la fois un ancien ministre de la Défense et un ex-patron des services secrets du Zimbabwe. Il a joué un rôle clé dans les violences qui ont ensanglanté la présidentielle de 2008, remportée par Mugabe après le retrait de l’opposant Morgan Tsvangirai. Il est aussi soupçonné d’être l’architecte des « atrocités de Gukurahundi » dans le sud du pays dans les années 1980, alors qu’il était ministre de la Sécurité.
Robert et Grace Mugabe, les « demi-dieux »
Après son éviction, il avait promis de défier Robert et Grace Mugabe, les accusant de se prendre pour des « demi-dieux ». Il a assuré qu’il « reviendrait au Zimbabwe pour diriger » la Zanu-PF, qui n’est pas « la propriété personnelle » des Mugabe.
La réponse du régime ne s’est pas fait attendre : il a été exclu du parti, qui tient son congrès le mois prochain. À cette occasion, Grace Mugabe, une figure très controversée, pourrait être nommée à un des deux postes de vice-président qui est désormais vacant et se retrouverait en position idéale pour succéder à son époux âgé de 93 ans.
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Mugabe a déjà été investi par la Zanu-PF en vue de la présidentielle de 2018 en dépit de son grand âge et sa santé fragile. Il contrôle d’une main de fer le Zimbabwe depuis près de quatre décennies, mais l’éviction d’Emmerson Mnangagwa pourrait avoir des répercussions incontrôlables à l’approche de ces élections générales de 2018.
Le Zimbabwe est déjà plongé depuis les années 2000 dans une grave crise économique et financière. Le chômage y atteint des sommets.
Avec AFP