Le mythique ancien joueur et capitaine de la sélection guinéenne très lié au monde du football, Morlaye Soumah dit Colovati, a accordée une interview à Guinee360. Lors de cet entretien, il a parlé de sa carrière au sein du Syli et a analysé le problème du football en Guinée.
Guinee360: Vous êtes un ancien joueur et capitaine du Syli et pendant longtemps défenseur incontestable de la sélection guinéenne. Comment est-ce que vous vous sentez après votre retraite?
C’est vrai que j’étais un joueur professionnel pour la Guinée et pour d’autres clubs notamment Bastia. La Guinée a eu des bons défenseurs, mais beaucoup disent qu’il y en a pas eu comme moi. Moi je dis non! Il y a plein de jeunes talents. Le problème aujourd’hui est le problème d’éducation et de base. C’est ce qui manque à nos défenseurs, sinon, la Guinée regorge beaucoup de jeunes qui pourront faire mieux que moi. Le souci est qu’on n’a pas des éducateurs qu’il faut.
Alors qu’est-ce qu’il faut réellement, selon vous, pour sauvez le football guinéen ?
On essaye d’avoir des éducateurs. Mais comment ça pourra aller si on le fait par tâtonnement? Un éducateur c’est quelqu’un qui doit connaître son métier. On ne doit pas le recruter par hasard ou par tâtonnement. C’est ce qui fait qu’on a du mal à progresser. Par exemple, si vous prenez le Mali, la Côte d’Ivoire ou le Sénégal, au niveau des jeunes ils sont au dessus de nous. On croit qu’on a de bons jeunes joueurs, mais ils sont limités par rapport aux autres. Pourquoi, parce que les autres pays font ce qu’il faut pour y arriver. Nous aussi, nous pouvons, mais à condition que nos dirigeants comprennent qu’est-ce que le football doit apporter à la Guinée et particulièrement pour les joueurs et surtout pour le bonheur du peuple.
Qu’est-ce que vous êtes devenu après votre retraite?
Je travaillais avec SC Bastia et là, je continue à travailler avec des amis Blancs. Mais, je voulais être éducateur ici. Notre génération, il y a beaucoup qui sont sur le terrain mais malheureusement nous ne sommes pas sollicités. Ils préfèrent aller chercher des incapables dans les quartiers le faire le travail que nous nous devons faire et pourtant ils savent que nous sommes là. Si nos dirigeants sont incapables de mettre les gens capables pour faire évoluer nos jeunes, franchement, je ne vois pas de solution.
Au temps de Michel Dussuyer, vous étiez au sein du staff du Syli. Qu’est-ce qui s’est passé pour qu’on vous enlève?
Le Guinéen ne connaît pas la continuité. J’étais d’abord avec Robert Nouzaret puis Dussuyer, mais vous savez en Guinée, quand tu ne fais pas le lèche-cul pour les gens, tu ne vas jamais passer. Moi, mon métier c’est le football. Mais nos dirigeants, franchement, je ne sais pas comment les qualifier. Est-ce qu’on en a d’ailleurs. On a fait venir M. Antonio, il fait de son mieux mais est-ce que tout le monde sera dernière lui pour faire avancer notre football? ça m’étonnerait. En tout cas, je lui dirai de réfléchir cinq fois avant de faire quoi que ça soit parce que franchement on est arrivé à un niveau pitoyable.
Justement, en parlant d’Antonio Souaré, il a engagé récemment des audits où certains cadres de la fédération ont été épinglés. C’est le cas de Blasco, Sekou Morthon et de l’ancien président de la fédération, Salifou Camara super V. Comment réagissez-vous à cette situation?
Je ne vais pas entrer dans cette polémique. Moi je ne connais que le terrain. Côté administratif, je ne me suis jamais intéressé. Même quand je travaillais au sein du staff du Syli je le faisais bénévolement sans salaire. Michel m’a demandé de les aider et je le fais pour les jeunes et pour l’amour de mon pays. Mais parfois je me demande si je ne suis pas con. Car j’ai mouillé le maillot pour ce pays, j’ai fait tout ce que je pouvais en tant que footballeur pour cette nation et aujourd’hui je suis là et ils préfèrent ramasser des gens dans les quartiers qui n’ont pas de niveau. Je dirai à Antonio de venir vers les sportifs pour qu’ils puissent l’aider à s’en sortir. Parce qu’on a beau aimer le football mais si tu ne connais pas ça n’ira nulle part et on sera toujours les derniers.
Au cours d’un point de presse animé le 11 décembre, l’actuel ministre des sports Sanoussy Bantama Sow a affirmé que l’un des échecs du Syli est dû aux supporters. Partagez-vous cet avis ?
C’est dû à tout le monde. Aujourd’hui il y a certains supporters qui deviennent de commanditaires de l’équipe nationale. Les supporters, ils vont dans le stade pour supporter. Si l’équipe fait du bon travail ils applaudissent si c’est le contraire, ils ont le droit de critiquer. Mais ils ne doivent pas être les décideurs au niveau de l’encadrement, sinon on va droit au mûr.
Quel est le plus grand regret de Morlaye Soumah durant sa carrière footballistique ?
Je n’ai pas de regrets. Tout ce que j’ai eu je l’ai voulu. J’étais fier de jouer pour la Guinée et fier de faire ce métier.
Vos plus beaux vos souvenirs ?
C’est de connaître beaucoup de joueurs de ma génération. En tout cas, on a fait la fierté de la Guinée. Je pense que c’est la meilleure des choses, être reconnu par le métier qu’on fait pour son pays.
Vous avez participé à trois coupes d’Afrique des nations. Quel est le match qui vous a marqué de plus?
Tous les matchs sont bons. Mais l’élimination de la Guinée par le Mali (en 1/4 de finale 2004 à Tunis, NDLR) alors qu’on avait le match en main pour se qualifier en 1/2 finale. Malheureusement ce n’était pas notre jour de chance. Sinon on a mené et on a tout fait mais à l’arrivée on a perdu. C’est le seul regret que je dois avoir dans ma carrière.
Votre mot de la fin
Qu’on mette les gens qu’il faut à la place qu’il faut. Que les supporters jouent leur rôle et les dirigeants assument leurs responsabilités et que les joueurs fassent leur travail. Les encadreurs doivent faire ce qu’il faut et non être des businessmen.
Merci
C’est à moi de vous remercier.
Interview réalisée par Hassatou Barry