Pendant que dans le monde entier, la tendance est plus que jamais à la promotion des entreprises ou compétences locales, en Guinée cette promotion est en train hélas d’emprunter le parcours du combattant. Comme cela pourrait malheureusement s’illustrer dans l’attribution en vue des marchés relatifs aux travaux de construction de trois importants axes routiers de notre pays situés sur les Routes Nationales 1 et 2.
Tout porte à croire en effet qu’il ne faudrait surtout pas compter sur l’engagement de l’actuelle ministre des Travaux Publics, Mme Oumou Camara, pour défendre becs et ongles les droits revenant à nos entreprises dans la panoplie de toutes celles des Pays Membres autorisés à soumissionner…
La Banque Islamique de Développement (BID) a décidé d’assurer le financement des travaux de construction de la Route Nationale 1 (Dabola – Cissela), la Route Nationale 1 (Cissela – Kouroussa PK151), ainsi que la Route Nationale 2 (PK63 –Gueckedou).
La durée d’exécution des travaux desdites routes oscille entre 24 – 30 mois, repartis en 3 Lots distincts. Comme elle en a l’habitude en pareil cas, la BID a fait étalage de ses exigences dans le ‘’Dossier d’Appel d’Offres International Ouvert’’ conçu à cet effet.
Dans le ‘’Guide de l’Utilisateur pour la Passation des Marchés de Travaux de grande taille’’, afin de rendre limpide la procédure de soumission, plus précisément dans le volet consacré au ‘’Format de lettre aux candidats pré-qualifiés’’, il convient de souligner ce qui suit : « Les soumissionnaires remplissant les conditions requises pour la préférence en faveur des entreprises provenant des Pays Membres, bénéficieront d’une marge de 10 pourcent lors de l’évaluation des offres conformément au paragraphe 2.39 des Directives pour la Passation des Marchés financés par la Banque Islamique de Développement édition de mai 2009 révisée en février 2012 ».
Il faut ajouter à cela que même dans le cas d’un ‘’Avis d’Appel d’Offres sans pré-qualification’’, l’Institution bancaire islamique n’entérine pas moins le principe lié à la ‘’Marge de préférence’’. Et cela est stipulé comme suit : « Conformément au paragraphe 2.39 des Directives pour la Passation des Marchés financés par la Banque Islamique de Développement dans le cas d’un AOI ouvert, une marge de préférence de 10% (dix pourcent) pourra être accordée aux entreprises des pays Membres conformément et sous réserve des dispositions suivantes… ».
S’agissant des dispositions suivantes, soulignées plus haut, que nous n’avons pas jugé utile d’étaler ici, il faut dire qu’elles n’excluent donc en rien les entreprises locales guinéennes, du moins en ce qui concerne leurs statuts et avantages s’y rattachant. En un mot comme en mille, disons qu’en leur qualité d’entreprises provenant du pays ayant bénéficié du financement de la BID, en l’occurrence ici la Guinée, ce sont seulement elles les heureuses élues de la marge de préférence de 10%.
Les autres entreprises des Pays Membres peuvent certes soumissionner, mais il n’y aura pas de préférence de 10% pour elles. Quoi de plus normal, dirions-nous, pour qui sait que d’aucunes parmi nos entreprises locales ont consenti de lourds sacrifices en tissant des partenariats solides et féconds avec des entreprises de renommée internationale. Histoire sans doute de faire taire de nombreux détracteurs n’ayant de préférence que pour ce qui provient de l’étranger. C’est comme si nos entreprises locales voulaient définitivement clore le débat sur leurs prétendues incompétences. Et cela est du reste des plus légitimes.
Au vu de ce qui précède, les questions qui devraient prévaloir à notre sens dans ce qui tout l’air d’une ténébreuse affaire de passations de marchés, ce sont plutôt celles-ci : Pourquoi, bon sang, Madame le ministre des Travaux Publics, ne voudrait-elle pas tenir compte de la ‘’Marge de préférence’’ ? Que reprocherait-elle par hasard aux entreprises de son pays dans les passations des marchés susmentionnés ? Ces questions deviennent davantage légitimes lorsqu’on se fie au fait que Madame Oumou Camara, selon certaines indiscrétions, aurait unilatéralement décidé de se défaire de la ‘’Marge de préférence’’ dans l’Appel d’Offres International projeté.
En tout cas, dans la Section II relative aux Données Particulières de l’Appel d’Offres dont nous avons copie, la mention « Une marge de préférence sera accordée » s’est résolument muée en « Une marge de préférence ne sera pas accordée ». Un changement de taille, lequel s’il devait prospérer, mériterait amplement d’explication.
Surtout, disons-le clairement, ce changement qui pourrait être lourd de conséquence mettrait alors dans une mauvaise posture les entreprises locales, dont la contribution au développement de notre pays est pourtant devenu incontournable. Il est d’autant nécessaire de faire la lumière sur cette affaire aux allures de scandale que des mauvaises langues racontent que Madame le ministre aurait ses propres préférences qui ne seraient pas forcement locales. Vrai ou faux, la suite nous le dira plus clairement.
Nous y reviendrons…