La rédaction de Mosaiqueguinee.com a eu un échange téléphonique avec le syndicaliste Mamadou Mansaré, en séjour en France pour des raisons de santé. C’est lui qui avait présidé l’inter-centrale syndicale ayant conçu et mis en oeuvre, avec l’appui du FMI et de la Banque Mondiale, lors d’une retraite à Kindia, un plan global de revendications syndicales pour la période 2014-2020.
Un plan que le SLECG, sous la direction d’Aboubacar Soumah, vient de remettre en cause en demandant un salaire de base de 8 millions pour les enseignants et une « augmentation » de 40% de l’indice salarial.
De son lit de malade, Mamadou Mansaré nous a donné sa lecture de la situation en commençant par l’historique des négociations. D’abord, entame notre interlocuteur, j’ai le devoir historique de rendre compte de la vérité.
Lisez !
En 2014, nous avons constaté qu’il y a eu trop de morts sans qu’il n’y ait un résultat positif sur le panier de la ménagère. C’est pourquoi nous avons mis en place une commission de l’inter-centrale syndicale, présidée par moi. Il y avait quinze (15) membres. Nous avons fait une retraite à Kindia avec l’appui du Fonds Monétaire International et la Banque mondiale. Nous avons disséqué le budget de l’Etat. En fonction des réalités, nous avons battu un programme de revendications allant jusqu’en 2020. La première bataille était sur la valeur du point d’indice.
C’est ainsi qu’en octobre 2014, nous avons acquis les 40%. Nous sommes partis à 1030 pour la santé et les enseignants et à 997 pour les autres fonctionnaires. Il faut reconnaître que le statut particulier de l’éducation a été obtenu depuis le temps de Lansana Conté, mais ça n’avait jamais été appliqué. Nous avons dépoussiéré le statut particulier de l’éducation et l’avons mis sur rails.
Après cela, nous nous sommes attaqués à la deuxième partie qui est la grille indiciaire. Nous avons éclaté les différentes hiérarchies en B1, B2, A1, A2 et A3. Et aujourd’hui, l’indice le plus élevé se retrouve dans l’ordre de 3.500, on a multiplié l’indice au niveau de chaque catégorie. Mais, les experts de la fonction publique ont pensé être plus malins que le syndicat en prenant les 40% de la valeur du point d’indice obtenus en octobre 2014 pour inclure ça dans les indices. Alors on a vu la supercherie, c’était trop clair !
Nous avons décidé d’attende que le décret sorte. Et, effectivement, le piège s’est refermé sur eux puisque le décret est sorti sans parler du point d’indice. On a dit que c’est un acquis. Il s’agissait maintenant pour nous de prendre la valeur du point d’indice et multiplier cela par les indices que le chef de l’Etat nous a accordés et discuter ensuite des accessoires du statut particulier de l’éducation et de la santé.
C’est à ce niveau qu’il y a eu incompréhension entre les parties. Lorsque je quittais autour de la table, les camarades se sont retrouvés devant un dilemme. Il y avait quinze mille jeunes fonctionnaires à recruter dont huit mille enseignants. Parmi ces huit mille enseignants, il y avait près de deux mille contractuels qui avaient fait le concours, mais qui n’étaient pas admis.
Les 8 mille ont été recrutés, on a recruté aussi 5 mille agents de santé y compris les jeunes qui se sont battus pour lutter contre Ebola. On s’est dit qu’il fallait faire des sacrifices, on était entre septembre et décembre. C’est ainsi que les camardes ont fait un échelonnement : 10% au mois de février 2018 avec rétroactivité à janvier 2018, 10 % au mois de juin et le reste en 2019. La commission comprenait au moins huit personnes de l’intersyndicale de l’éducation SLECG-FSPE. Leur délégation était dirigée par Aboubacar Soumah et Ben de la FSPE. On a discuté du statut de l’éducation. C’est ainsi que l’article 100 du statut, portant sur les accessoires, a été discuté. Ce sont eux qui ont fait des propositions qu’on a appuyées.
Au moment où je quittais la table de négociations, ce qui restait, c’est le payement effectif de la prime de préparation et la prime de recherche, on a mis l’éducation en demeure de le faire. Il restait maintenant à dépoussiérer le statut de la santé. Là aussi, on a estimé qu’il fallait faire les mêmes revendications pour l’éducation. Cela aussi était prévu au 1er septembre 2019.
Personnellement, je pense qu’il faut voir la Guinée en face ! En faisant une revendication, un syndicaliste regarde toutes les deux colonnes. Quand tu crées une dépense, tu crées une ligne dans les recettes. Dire aujourd’hui qu’on pourra donner 8 millions à près de 47% des fonctionnaires, c’est la faillite comme ça se passe actuellement au Tchad, au Togo, au Bénin et au Mali où les travailleurs ne sont pas payés. Nous partons tout droit vers la planche à billets. Le plan d’action que nous avions battu, est le meilleur.
Propos recueillis et transcrits par Thierno Amadou M’Bonet Camara