A 40 ans, Bonaventure Kalou, l’ancien international ivoirien (52 sélections) a décidé de se porter candidat aux prochaines élections municipales à Vavoua, où son père avait été candidat PDCI. L’ex-milieu de terrain formé à l’ASEC-Abidjan et passé notamment par le Feyenoord Rotterdam, Auxerre et le PSG explique à Jeune Afrique les raisons de cet engagement.
Bonaventure Kalou a-t-il succombé au syndrome George Weah ? L’ancien international ivoirien, qui cumule tout de même 52 sélections, a décidé de se lancer en politique. Et pour ses premiers pas dans l’arène, il a décidé de se porter candidat à la mairie de Vavoua, ville de naissance de son père, qui fut le candidat du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Lui se présente en tant qu’« indépendant ».
Jeune Afrique : Vous avez décidé de vous présenter aux élections municipales de juillet prochain. Pourquoi vous lancer dans ce projet ?
Bonaventure Kalou : J’ai pris ma décision il y a un an, lors des obsèques de mon père. Je n’avais rien annoncé jusqu’à ces derniers jours. Moi, je suis né à Oumé, où mon père, enseignant, a fait toute sa carrière. Mais il était né à Vavoua, comme ma mère. Mon père, lors des dernières municipales, était sur la liste du candidat du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI). Et il était prévu qu’il soit tête de liste lors de celles de cette année.
Ma candidature est pour moi une occasion d’honorer la mémoire de mon père, mais pas seulement : lors des obsèques, j’ai pu constater l’état de délabrement de la ville.
Personne n’avait vu venir votre candidature. Sous quelle étiquette vous présentez-vous ?
Je suis un indépendant. En Côte d’Ivoire, la politique cristallise beaucoup de passion. Je ne me présente pas pour faire de la politique politicienne. Sinon, j’aurais été candidat aux législatives. Je considère que la fonction de maire n’est pas politique au sens strict du terme.
Je sais que je vais prendre des coups. J’ai eu l’habitude. Mais au foot, après le match, on se sert la main. En politique, c’est beaucoup plus mesquin…
Le maire de Vavoua, Théodule Diro Lahuet, est membre du Rassemblement des républicains (RDR) le parti du président Alassane Ouattara. Vous considérez-vous comme opposant à la mouvance présidentielle ?
Je sais que le maire de Vavoua a été surpris par l’annonce de ma candidature. Je sais que, si je devais être élu, je pourrais être la cible de quelques mesquineries. Je ne suis pas un politicien. Je n’ai pas besoin de la politique pour m’enrichir. Je sais que je vais prendre des coups. J’ai eu l’habitude, lors de ma carrière de footballeur, puisque je jouais attaquant. Mais après le match, on se sert la main. En politique, c’est beaucoup plus mesquin…
Alassane Ouattara, le chef de l’État, achèvera son second mandat en 2020, avant, peut-être, d’en briguer un troisième. Quel regard portez-vous sur son action ?
La Côte d’Ivoire a connu des années très difficiles. Le président Ouattara est arrivé après une très grave crise. Aujourd’hui encore, il y a beaucoup de problèmes. Bien sûr, des choses ont été faites : le pays s’est modernisé, on a construit des ponts, des routes. Au niveau de la sécurité face au risque terroriste, il y a eu de gros efforts depuis l’attentat de Grand-Bassam (le 13 mars 2016, un attentat revendique par Al-Qaïda au maghreb Islamique avait fait 22 morts, dont les trois assaillants, et 33 blessés, NDLR).
L’économie se porte mieux. Mais une grande partie de la population se plaint à juste titre de ne pas ressentir les effets de la croissance. Le pouvoir a été confronté à une mutinerie dans l’armée. La corruption reste élevée, même si la Côte d’Ivoire n’est pas le seul pays touché.
Certains militants sont des fanatiques. Ils refusent toute critique sur leur parti et sur le leader de ce parti
Que pensez-vous du climat politique actuel dans le pays ?
Il y a beaucoup de violence verbale, qui débouche inévitablement sur la violence physique. Pourquoi ? Parce que certains militants sont quelque part des fanatiques. Ils refusent toute critique sur leur parti et sur le leader de ce parti, qui n’a à leurs yeux aucun défaut. Ils n’acceptent pas le débat contradictoire.
En Côte d’Ivoire, le débat est souvent beaucoup trop passionné et violent. Ce n’est pas une bonne chose pour le pays. On a connu la guerre. Et en Côte d’Ivoire, on trouve encore des va-t-en-guerre. Les débats entre les principaux partis manquent de sérénité. On ne prend pas assez de recul. Malgré tout, je reste optimiste pour le processus de réconciliation nationale, qui prendra du temps. Le président Ouattara la souhaite, en tant que père de la nation, même s’il ne peut pas forcer les gens.
Comment vous placez-vous sur le cas de Simone Gbagbo ? Condamnée en mars 2015 à vingt ans d’emprisonnement pour atteinte à la sécurité et à la sûreté de l’État et est détenue depuis décembre 2014 à l’École de gendarmerie d’Abidjan. Rejoignez-vous ceux qui réclament sa libération ?
Je pense qu’il faut des actes forts pour renforcer le dialogue républicain. Les partis d’opposition attendent cela de la part du président Ouattara, afin d’instaurer un climat plus apaisé. Ils lui feraient davantage confiance. Alors, une grâce ou une libération de Simone Gbagbo pourrait aller dans ce sens. Nous sommes Africains, il y a des choses que nous devons régler sous l’arbre à palabres…
Et sur le procès de Laurent Ggabgo, quelle est votre position ?
Il aurait été plus logique que les Ivoiriens se retrouvent entre eux et que Laurent Gbagbo soit jugé en Côte d’Ivoire plutôt qu’à la CPI…