A 32 ans, Biba sillonne la capitale burkinabè dans sa petite Citroën verte et rose hors d’âge. Elle est la seule femme chauffeur de taxi à Ouagadougou. Le taxi lui rapporte entre 100.000 et 250.000 francs CFA (150 à 380 euros) par mois, un revenu correct au Burkina Faso.
«J’ai de la chance parce que ça se passe bien. Depuis que j’ai commencé, je suis encouragée par tout le monde», confie Bibata Gansgné, 32 ans. Depuis qu’elle s’est lancée dans le métier, il y a huit ans, elle est même devenue une sorte de mascotte pour ses collègues masculins.
«Il y a des femmes qui conduisent des remorques, il y a des femmes qui conduisent des camions, mais des taxis, c’est rare d’en voir parce qu’on prend plusieurs personnes à gauche à droite… Pour une femme, c’est un peu difficile», estime un collègue masculin, Aboubakar Ben Sidik. Il est admiratif: «Elle a du courage!»
Biba souligne la bienveillance de ses collègues masculins: «Même lorsque j’ai une panne, il y a toujours un taximètre pour venir me dépanner.» Elle est aussi appréciée des clients, explique Brigitte, propriétaire de la maison d’hôtes Chez Sego: «Je fais appel à elle le plus souvent possible – quand elle n’est pas prise, parce qu’elle est très souvent prise –, elle est très sérieuse, compétente, elle conduit très bien, très prudemment et tous les clients l’apprécient». Certains clients sont même devenus amis avec elle.
Les journées de travail sont longues pour Biba, mère d’un garçon de 6 ans. Réveil à 5h30 le matin pour s’occuper de son petit et l’emmener à l’école, puis conduite jusqu’en soirée, parfois tard, tant qu’il y a des clients. «Quand je suis débordée, j’ai ma famille, j’ai des gens pour aller chercher mon enfant et l’amener à la maison», explique-t-elle.
Le taxi lui rapporte entre 100.000 et 250.000 francs CFA (150 à 380 euros) par mois, un revenu correct au Burkina Faso. Couturière de formation, elle a décidé au départ de devenir taxiwoman pour gagner un complément de revenu. «J’avais déjà le permis de conduire. Pourquoi ne pas essayer de (le) valoriser? C’est là que j’ai commencé le taxi, et ça allait», raconte-t-elle. «C’est vrai qu’avec mes collègues, il y en a quelques-uns qui se sont dit que je n’allais pas pouvoir tenir parce que c’est un travail d’homme. Et deux ans plus tard, ils m’ont dit: « Maintenant, tu as souvent plus de clientèle que nous! »»
Bibata Gansgné voit désormais plus loin: «Mon projet à long terme, c’est d’avoir une société de taxis», dans laquelle elle compte embaucher des femmes comme chauffeurs. Avec une discrimination positive: «Si une femme et un homme se présentent, la femme sera prioritaire», précise-t-elle.
«Je ne sais pas pourquoi il n’y a pas d’autres femmes taxi. Peut-être qu’elles trouvent que c’est un travail d’homme ou peut-être que le courage leur manque?», s’interroge Biba. «Il ne faut pas écouter le jugement des gens. Moi j’encourage les gens, surtout les femmes, à se donner à fond. Il ne faut pas dépendre de quelqu’un, il faut compter sur soi-même.»
En attendant de pouvoir monter sa société, Biba économise pour acheter un nouveau véhicule. Il devra être climatisé, afin de satisfaire sa clientèle pendant les périodes de fortes chaleurs, et tout-terrain, pour amener ses clients dans tout le Burkina.