En lançant le 28 avril dernier, à Faranah, la campagne nationale de vaccination contre le paludisme à travers le pays, le ministre de la Santé et de l’Hygiène publique, Abdourahamane Diallo, a certainement pensé renvoyer aux Guinéens l’image d’un ministre au cœur de leurs problèmes de santé. Ce qui est loin d’être le cas. De l’avis de tous les observateurs avertis, ce ministre de la Santé semble avoir plutôt un goût prononcé pour le paradoxe.
En effet, au lieu de mener tambour battant cette campagne qui s’apparente à une sorte d’opération de communication pour faire croire aux plus naïfs que le département de la Santé et de l’Hygiène publique est dans de bonnes mains, le ministre Abdourahamane Diallo serait bien inspiré de s’attaquer frontalement d’abord à l’insalubrité chronique des structures de santé du pays (Hôpitaux nationaux, régionaux, préfectoraux, centres de santé, postes de santé, etc).
Comme on l’a écrit dans l’un de nos précédents articles, le cas le plus emblématique est celui de l’hôpital national Ignace Deen à Kaloum, la commune de la capitale qui abrite la Haute administration. Il suffirait d’y faire un tour ou accompagner un patient pour s’en rendre compte avec un réel pincement au cœur : odeurs nauséabondes, détritus jetés çà et là, toilettes quasiment inutilisables, cabines sales.
Cette triste réalité devrait plutôt interpeller le ministre Abdourahamane Diallo. On n’a pas besoin de rappeler que la santé est un secteur vital qui mérite une attention particulière. Il serait illusoire de penser qu’on peut se développer avec des ressources humaines qui ne pètent pas la santé. Dans l’administration publique, dans les entreprises, sur les chantiers, dans les mines, les transports, il nous faut obligatoirement des hommes et des femmes en bonne santé.
Quand les gens tombent malades, leur premier réflexe est d’aller immédiatement dans une structure sanitaire pour des consultations ou des soins. Les cas les plus sérieux peuvent nécessiter une hospitalisation plus ou moins longue. Seulement voilà : les hôpitaux publics guinéens, dans leur majorité, sont loin d’être un cadre idéal pour se remettre de sa maladie ou recevoir des soins appropriés. A l’insalubrité très poussée des lieux s’ajoutent l’affairisme et le clientélisme de certains hommes en blouse blanche pour pourrir littéralement la vie des pauvres patients. De là à présenter ces hôpitaux publics comme des ‘’mouroirs’’ il y a un pas que beaucoup d’observateurs n’hésitent à franchir avec empressement.
C’est pourquoi, les hauts cadres de l’Etat, les employés des entreprises privées et des personnes nanties ne se font plus prier pour aller se faire soigner dans les cliniques privées de la place. Il y en a qui préfèrent, à raison, prendre l’avion pour le Sénégal, la Côte d’Ivoire, le Maroc, la France ou les Etats-Unis d’Amérique. Même pour les maladies les plus bénignes. Cette situation aurait pu ou dû faire sortir de sa torpeur tout ministre soucieux de laisser des traces indélébiles à la tête de son département. Mais hélas !
Et comme si tout cela ne suffisait pas, selon des sources dignes de foi, le ministre Abdourahamane Diallo se plairait aussi à faire des nominations par décision. Ce que le président de la République, Pr. Alpha Condé, a pourtant formellement interdit à tous les membres de son gouvernement. C’est le lieu donc de l’interpeller par rapport à ce que d’aucuns prennent, à tort ou à raison, pour de ‘’l’indiscipline’’.
Monsieur le ministre de la Santé, une compagne de vaccination ne réussit que lorsqu’elle est menée dans un cadre approprié et salubre. A bon entendeur, salut !
Ibrahima Sory Cissé