Les gendarmes de Villard-de-Lans ont intercédé auprès de la préfecture de l’Isère pour que la situation de ce jeune Guinéen soit régularisée. Il a sauvé de la mort une jeune femme qui travaillait avec lui.
« Il a vraiment été exceptionnel ! Mahmoud Diallo a eu une attitude héroïque. Sans lui, on aurait été confronté à un véritable drame. Ce jeune Guinéen a gagné le droit à la reconnaissance de la France». Martine Chaligné, la directrice du centre de formation pour saisonniers (Afrat) d’Autrans sur le massif du Vercors, n’a pas de mots assez forts pour qualifier le courage de Mahmoud, demandeur d’asile de 21 ans. Il a sauvé la vie d’une jeune stagiaire agressée par un membre du personnel en pleine crise de démence.
Mardi dernier, alors que Mahmoud est en train de servir les plats dans la grande salle à manger du centre, il est alerté par des cris. Une jeune femme vient de se faire agresser par le chef-cuisinier, un homme d’une quarantaine d’années, pris d’une soudaine crise de démence : « J’ai entendu la fille crier. J’ai vu qu’elle avait le visage en sang. Le monsieur venait de la frapper avec une scie à découper la viande » , raconte Mahmoud.
«Je n’ai pas hésité, je voulais sauver cette fille»
Avec beaucoup de sang froid, il va alors affronter l’agresseur qui vient de s’emparer d’un long couteau. « Je me suis approché de lui et lui ai dit : « Chef, il faut laisser cette fille ». J’avais peur qu’il l’achève, qu’il la tue. Je l’ai ceinturé, maîtrisé, et je l’ai poussé dans la cuisine. J’ai réussi à le raisonner, à lui faire poser son couteau. Ensuite, j’ai parlé avec lui en attendant l’arrivée des gendarmes. C’est vrai que j’ai pris des risques, poursuit Mahmoud, mais je n’ai pas hésité, je voulais sauver cette fille. C’est Dieu qui m’a donné la force pour le faire ».
L’agresseur, souffrant de troubles psychiatriques, a été interné. La victime, hospitalisée, va mieux aujourd’hui. Au centre, on est bien conscient que Mahmoud a évité un drame de plus grande ampleur, car sans son intervention, le cuisinier-agresseur aurait pu s’en prendre à d’autres personnes. Les gendarmes de Villard-de-Lans, venus interpeller l’agresseur, ont décidé d’alerter le préfet de l’Isère sur le geste héroïque du jeune migrant guinéen, insistant sur le fait que le jeune homme « n’avait pas hésité, malgré son petit gabarit, à faire face à un agresseur beaucoup plus solide physiquement ».
«Au même titre que le sans-papier malien qui à Paris avait sauvé un enfant»
Pour les gendarmes, « Mahmoud Diallo mérite de voir sa situation régulariser, au même titre que le sans-papier malien qui à Paris avait sauvé un enfant suspendu à un balcon, en escaladant la façade d’un immeuble ». Ce dernier avait été naturalisé et a depuis intégré la brigade de sapeurs-pompiers de Paris.
Fort de ce soutien, Mahmoud espère pouvoir obtenir des papiers pour rester en France : « Je suis fier, dit-il sobrement. Qu’un jeune Guinéen ait défendu une Française, cela va rester dans l’histoire. Je veux rester ici pour continuer à apprendre le métier de cuisinier. Mon objectif est de retourner un jour en Guinée pour ouvrir un restaurant de cuisine française ».
Après un long périple à travers le Tchad, la Libye, puis le passage de la Méditerranée, le jeune migrant guinéen était arrivé à Grenoble en mars dernier. Stéphane, qui donne bénévolement des cours de français aux restos du cœur,avait été tout de suite conquis par la personnalité de ce jeune démuni qui galérait pour trouver un hébergement d’urgence. Ce Grenoblois au grand cœur lui avait alors proposé de l’héberger chez lui. « C’est un garçon très chouette, très attachant, et humble », confie-t-il. C’est lui qui avait décroché pour son jeune protégé un stage de formation en « restauration-hôtellerie » à l’Afrat d’Autrans. Pour Stéphane,« Mahmoud Diallo, avec son comportement magnifique, nous a donné une leçon de courage et d’humanité ».