Conakry, le 24 janvier 2022
A Messieurs, le Premier Ministre/Chef du Gouvernement/ Ministre de la Justice, Garde des Sceaux de la République de Guinée.
Messieurs les Ministres,
Nous nous faisons le devoir, avant toute prise de position sur la question de renvoie de votre prédécesseur du Gouvernement, soulève plusieurs interrogations, entre autres:
Dans un Etat de Droit, de bonne gouvernance démocratique et de démocratie pluraliste, le Président de la Transition, Chef de l’Etat, Chef Suprême des Armées et un de ces membres du Cabinet Présidentielle, ont-ils le droit de s’adresser à un membre du Gouvernement sans passé par le Premier Ministre, Chef du Gouvernement ?
Est-il légal qu’un Ministre de la Justice, Garde des Sceaux soit limogé par Décret du Président de la Transition sans l’avis du Premier Ministre, Chef du Gouvernement ?
Quel est le rôle constitutionnel dévolu au Ministre de la Justice, Garde des Sceaux dans un Etat démocratique ?
‘’La Cour de Répression des infractions Economiques et Financières, est une Juridiction illégale, incompétente et dépourvue de tout fondement juridique’’
Pourquoi le Ministre de la Justice est-il appelé le Garde des Sceaux ?
Le titre de Garde des Sceaux est un héritage de l’ancien régime Féodal en France. Cette fonction a en effet été créée par le roi Philip Auguste, au XIIème siècle, visait à conserver les archives royales et sceaux qui servaient à marquer les décisions du souverain, car à travers tout le royaume, la justice était rendue au nom du monarque, ce système a ensuite perduré jusqu’à la révolution française.
Puis, selon le principe de souveraineté du peuple et non du roi, il a été décidé symboliquement que la justice devait être rendue au nom de la population.
Le titre de Garde des Sceaux a alors été attribué logiquement au Ministre de la Justice.
Mais de nos jours, cette fonction n’est pas seulement une appellation, car le ministre de la Justice garde littéralement le sceau de la république.
Qu’est-ce que le(a) Garde des Sceaux ?
Le(a) Garde des Sceaux est le nom donné au ministre de la justice, car il est dépositaire des sceaux de l’Etat.
Il s’agit de l’un des membres les plus importants du gouvernement, puisqu’il est en charge de la gestion des juridictions et porte les projets de réforme judiciaire.
Le Garde des Sceaux, Ministre de la justice est membre du gouvernement. Il a des fonctions politiques et administratives.
Le titre le Garde des Sceaux est utilisé dans différents contextes et dans différents pays déterminant la personne porteuse du titre gardien et autorisé d’utiliser le garde des sceaux du pays.
Sur le Décret limogeant, Madame la Ministre de la Justice Garde des Sceaux du gouvernement de Mohamed BEAVOGUI, Premier Ministre Chef du Gouvernement :
Pour une fois, soyons loyal vis-à-vis des lois de la République, cette loyauté des lois de la République oblige Madame la Garde des Sceaux d’alors à se conformer scrupuleusement aux exigences de la feuille de route édictée par le Premier Ministre Chef du Gouvernement, comme code de bonne conduite pour chaque Ministre relavant de ses prérogatives transitoires et constitutionnelles en vigueur.
Dès après le limogeage de la Garde des Sceaux d’alors du Gouvernement par Décret du Président de la Transition en date du 31 Décembre 2021, beaucoup d’interprétations et d’analyses ont été faites dans la presse et par la presse.
En réalité, et pour une question d’honnête intellectuelle et du respect des lois de la République, Madame la Garde des Sceaux d’alors, avait pleinement raison de recadrer le Ministre Secrétaire Général à la présidence de la République, pour des raisons suivantes :
- Elle n’avait aucune obligation de recevabilité et de subordination vis-à-vis du Président de la Transition et de son Secrétaire Général à la présidence de la République ;
- Elle n’avait aucun ordre, ni instruction à recevoir du Président de la Transition et de son Secrétaire Général à la présidence de la République pour quel que motif que ce soit ;
- Elle avait l’obligation de subordination et de recevabilité que par devant le Premier Ministre/Chef du Gouvernement ;
- Elle est responsable de l’Organisation Judicaire de la République, et veille au bon fonctionnement de l’Administration de la Justice ;
- Elle est la vice-présidente du Conseil Supérieur de la Magistrature ;
- Elle est responsable de la chaine pénale ; au terme de l’article 35 du code de procédure pénale.
Sur l’indifférence du Premier Ministre/Chef du Gouvernement, face au limogeage de Mme la Ministre de la Justice Garde des Sceaux et la nomination de son successeur :
Pour rappel, les dispositions combinées des articles 61 et 62 de la Constitution du 22 Mars 2020, sont en vigueur dès la prorogation des lois nationales et supranationales, par le Président de la Transition, avec les dispositions des articles 32 et 51 de la Charte de la Transition portant la mission du Premier Ministre/Chef du Gouvernement disposent respectivement :
Article 61 de la Constitution susvisée « le Premier Ministre dispose du pouvoir règlementaire sous réserve des dispositions de l’article 39.
Il dispose de l’administration et assure l’exécution des lois et des décisions de justice.
Le Premier Ministre conduit la politique du gouvernement déterminé par le Président de la République. »
Article 62 de la Constitution suscitée: «les membres du Gouvernement sont responsables de la Direction de leurs départements respectifs devant le Premier Ministre. Ils sont solidairement responsables des décisions du conseil des Ministres.»
Article 32 de la Charte de la Transition : «Le respect des lois et règlements est un devoir impératif pour chaque Citoyen. »
Article 51 de la Charte de la Transition : «Le Premier Ministre dirige, coordonne et anime l’action gouvernementale.
Il dispose de l’administration .Il veille au bon fonctionnement des services publics, à la bonne gestion de l’économie nationale, des Finances Publiques et domaines de l’État, des Entreprises et des organismes Publics.
Il assure l’exécution des lois et règlements.
Il veille à l’application des décisions de la Justice. »
Et l’article 37 chapitre II du code de procédure pénale dispose : «Le Ministre de la Justice conduit la politique pénale déterminer par le Gouvernement.
Il veille à la cohérence de son application sur le territoire de la République.
A cette fin, il adresse aux magistrats du Ministère Public les instructions générales de Politique pénale.
Il peut dénoncer au procureur général des infractions à la politique dont il a connaissance, lui enjoindre par instructions écrites et versées au dossier de la procédure , d’engager ou faire engager les poursuites ou de saisir la juridiction compétente de telles réquisitions écrites que le ministère juge opportune.»
‘’Au regard de tout ce qui précède, le Premier Ministre/Chef du Gouvernement avait l’impérieuse obligation de déposer sa démission au poste de Premier Ministre/Chef du Gouvernement, ainsi que celle de son Gouvernement, auprès du Président de la Transition, Chef de l’Etat, Chef Suprême des Armées, pour violation manifeste et flagrante des dispositions susvisées’’.
En le faisant, le Premier Ministre/Chef du Gouvernement sera en parfaite harmonie avec la déclaration du Président de la Transition selon laquelle « la Justice sera désormais la boussole centrale qui va orienter toutes les actions du Comité National du Rassemblement pour le Développement.» En d’autres termes, la Garde des Sceaux limogée à tort par le Président de la Transition, pour avoir appliquée la feuille de route qui lui avait été attribuée par le Premier Ministre/Chef du Gouvernement, n’a fait que se conformer aux dispositions constitutionnelles, aux articles 32 et 51 de la Charte de la Transition et de l’article 37 du code de procédure pénale en vigueur en République de Guinée.
Tout refus du Premier Ministre/Chef du Gouvernement à déposer sa démission auprès du Président de la Transition, lui enlève toute crédibilité et de loyauté vis-à-vis du peuple de Guinée et des lois qui régissent le mode de fonctionnement de l’Etat.
Dès lors, le respect des lois et règlements est un devoir impératif et une obligation pour chaque citoyen dont vous en êtes un, voir l’article 32 de la Charte de la Transition.
Quant au Ministre de la Justice Garde des Sceaux entrant, en sa qualité d’Avocat, pour une question de probité morale et d’honnêteté intellectuelle, ne devrait pas du tout accepté d’être le successeur de la Garde des Sceaux sortante, face à l’indifférence du Premier Ministre/Chef du Gouvernement à s’assumer dans la rigueur de ses obligations constitutionnelles et transitoires en vigueur.
Sur la création de la Cour de Répression des Infractions Economiques et Financières (CRIEF) :
Le Ministre de la Justice, Garde des Sceaux que vous êtes, est le responsable de l’organisation judiciaire et de son bon fonctionnement.
A ce titre, vous avez l’obligation d’attirer l’attention du Président de la Transition, une fois que les lois nationales et supranationales sont prorogées par lui, il ne peut en aucun cas s’arroser le droit de créer une autre juridiction de jugement quelle qu’elle soit, qui relève du domaine de la loi et non du domaine réglementaire (Décret ou Ordonnance).
Par contre, la loi ordinaire N°2015/019/AN portant organisation judiciaire en République de Guinée définie le mode de fonctionnement des juridictions juridictionnelles en République de Guinée, dispose en ses articles 1,2, et suivants :
Chapitre I –Dispositions communes aux juridictions :
Article 1 : «La Justice est rendue sur toute l’étendue du territoire au du nom peuple de Guinée.»
Article 2 : « Pour rendre la justice sur toute l’étendue du territoire de la Guinée, il est créé des juridictions ordinaires ou de droits communs et les juridictions d’exception.
Les juridictions de droit commun sont : la Cour Suprême, les Cours d’appel, les Tribunaux de Première Instance.
Les juridictions d’exception sont : la Cour des comptes, le Tribunal du commerce, le Tribunal pour Enfants, le Tribunal militaire et le Tribunal du travail.»
Pour ce faire, il est important pour le Ministre de la Justice Garde des Sceaux, en sa qualité de dépositaire des lois et les Sceaux de la République, d’informer le Président de l’existence d’une loi portant organisation judiciaire en République de Guinée, compétente pour examiner toutes les infractions portant sur les délits et crimes qu’ils soient économiques ou financiers relevant de la compétence exclusive des cours et tribunaux déjà en vigueur.
En conclusion, la création de la Cour de Répression des infractions Economiques et Financières (CRIEF), n’a pas sa raison d’exister car , il serait mieux de donner les moyens financiers et matériels aux juridictions existantes pour faire face à cette problématique de détournement présumé des deniers publics, devenus une pandémie au sein de l’Administration publique en République de Guinée.
Vous en souhaitent bonne réception, veillez croire Monsieur le Ministre de la Justice Garde des Sceaux, en l’Assurance de ma franche et sincère collaboration.
Que Dieu le Tout puissant, bénisse et protège la Guinée, les guinéennes et guinéens, Amen !
Alfoussény MAGASSOUBA
Directeur de publication du journal Kuru kan Fuga
Tél : 661-50-91-70/628-61-71-39-Enta Marché