Le capitaine Blaise Compaoré, dans une lettre, a demandé pardon au peuple burkinabè, à la famille de Thomas Sankara et à celles de tous ceux qui ont été tués sous son magistère à la tête de l’Etat burkinabè depuis 1987.
Toutefois et pour ma part, je n’ai pas senti dans cette lettre un sincère repentir et un pardon venant du fond de son coeur endurci par 45 longues années de cruauté.
Blaise Compaoré était récemment, le 8 juillet, à Ouagadougou où il devait avoir une rencontre dite de réconciliation avec les deux anciens chefs d’Etat encore vivants, sous la « médiation du Lt colonel Damiba. Une rencontre qui a foiré et tourné au ridicule. Quand on lit la demande de pardon de Compaoré, l’on comprend que cette lettre devait être lu lors de cette rencontre qui n’a pas eu lieu. Les termes rédactionnels de temps prouvent que cette lettre avait été écrite au moins 2 semaines avant. En tout cas pas maintenant. Ce qui participe déjà de la malhonnêteté et du manque de sincérité.
Ensuite, je suis persuadé que le Blaise Compaoré grabataire que j’ai vu dans les vidéos lors de cette fameuse rencontre n’a pas écrit cette lettre. Impossible ! Ce monsieur, hagard qu’il était devant les caméras, ne jouit absolument plus de toutes ses facultés mentales. D’autres personnes autour de lui qui ne peuvent pas rentrer au Burkina sans se retrouver en prison sont les véritables auteurs de cette lettre devenue pour ainsi dire scandaleuse pour les familles des victimes. Alors, on utilise Compaoré pour parvenir à ses fins. Sinon, dans son état actuel, Compaoré ne saurait voir une différence entre rester à Abidjan ou rentrer à Ouagadougou.
Un autre aspect choquant de cette lettre, c’est le fait de ne pas reconnaître explicitement sa responsabilité dans les crimes commis et les ordres qu’il a personnement donnés dans ce sens. Sa demande de pardon pour tous les crimes commis sous son magistère peut s’interpréter de la manière suivante : « Je demande pardon même si je ne suis pas directement concerné, mais c’est sous mon magistère donc j’assume ». C’est un disque rayé déjà utilisé par d’autres chefs d’État. D’où encore une fois de plus le manque de sincérité de sa part ou des rédacteurs de cette lettre.
En réalité, cette demande de pardon a pour but profond de permettre au Lt colonel Damiba de prendre, sans heurter les populations, une grâce présidentielle pour le capitaine Blaise Compaoré, condamné à perpétuité pour l’assassinat de Thomas Sankara et de 12 de ses compagnons. Gardons chaque fois à l’esprit que Damiba est le « petit » de Compaoré et du tristement célèbre Gilbert Diendjéré. Le retour de Compaoré et de ses affidés serait donc la véritable raison du coup d’État de Damiba et non une quelconque lutte contre le terrorisme qui ne fait que s’aggraver d’ailleurs.
Au vu de ces aspects, j’en passe et des meilleurs, peut-on croire à la sincérité du pardon demandé par Blaise ? Lui qui n’a jamais reconnu, même dans sa lettre, le meurtre de Thomas Sankara ? Car, reconnaître explicitement et « assumer tout ce qui s’est passé sous mon magistère » font deux. Damiba, Gilbert Diendjéré, Chantal Compaoré et bien d’autres feraient alors mieux de revoir leur copie. Je reviendrais sous les aspects méconnus des crimes de Compaoré de 1983 à 2014.
Abdoulaye Sankara
Journaliste