À nouveau médiateur dans le conflit ouvert qui oppose le Premier ministre Zida au Régiment de sécurité présidentielle (RSP) depuis plusieurs jours, le président Michel Kafando a mis sur pied un « cadre de concertation des sages » censé trouver une solution à cette crise qui fait tanguer le régime de transition à trois mois des élections.
Son discours était attendu par des millions de Burkinabè… qui devront patienter encore un peu. Prévu le jeudi 9 juillet à 20h à la télévision nationale, la prise de position du président Michel Kafando sur la situation tendue entre le Premier ministre Isaac Zida et le Régiment de sécurité présidentielle n’a finalement pas eu lieu. À la dernière minute, le présentateur de la RTB a annoncé à la fin de son journal que le discours du chef de l’État était « reporté », sans fournir d’explications supplémentaires.
Plus tardivement dans la nuit, la présidence a diffusé un communiqué expliquant que Michel Kafando avait mis sur pied un « cadre de concertation des sages » censé résoudre la crise actuelle au sommet de l’État. Accusé d’avoir comploté contre le RSP à son retour de Taïwan, Isaac Zida est une nouvelle fois en position délicate depuis plus d’une semaine. La garde présidentielle, mais aussi le reste de l’état-major de l’armée, réclame ouvertement sa démission et celles des autres militaires présents dans le gouvernement.
Le principal intéressé, lui, ne compte pas se laisser faire et montre les muscles. Entre critiques à des journalistes – qualifiés de « non-professionnels » et accusés de relayer des rumeurs – et parade dans les rues de Ouagadougou avec ses soutiens au sein de la société civile, le Premier ministre ne cesse de répéter qu’il ira au bout de son mandat et qu’il « tiendra ferme ».
Nombreuses inquiétudes sur la suite de la transition
Face à ce blocage qui suscite de nombreuses inquiétudes sur la suite de la transition à seulement trois mois des élections, le président Kafando se retrouve une fois de plus dans le rôle d’arbitre. Jeudi après-midi, il a convié les membres du « cadre de concertation des sages » au palais de Kosyam pour mener une énième médiation. Étaient présents l’ex-président Jean-Baptiste Ouédraogo, des chefs traditionnels et religieux, ainsi qu’Isaac Zida, le général Gilbert Dienderé, le général Pingrenoma Zagré, chef d’état-major général des armées, ou encore le lieutenant-colonel Céleste Coulibaly, chef de corps du RSP.
Selon le communiqué de la présidence, les objectifs de cette réunion étaient « la décrispation de la tension sociale actuelle, la sauvegarde de la paix sociale à travers l’unité et la cohésion de l’Armée et la poursuite du processus de la transition vers des élections apaisées en octobre 2015″. Concernant l’avenir du RSP, question récurrente depuis le début de la transition, le « cadre de concertation des sages » a estimé qu’il fallait conserver le « statu quo » et qu’il reviendrait aux autorités élues de trouver une solution définitive. Le conflit ouvert entre la garde présidentielle et le Premier ministre n’est en revanche pas mentionné.
Ancien ambassadeur du Burkina auprès des Nations unies, Michel Kafando – qui, selon une source diplomatique, « marche chaque jour sur des œufs » – devra une nouvelle fois user de tous ses talents de diplomate pour tenter de trouver une solution acceptée par tous. Il semble clair que la démission de Zida et des militaires du gouvernement plongerait la transition dans l’inconnu. Un scénario que le président souhaite à tout prix éviter, lui qui fait tout pour tenir son cap : l’organisation du premier tour des élections présidentielle et législatives le 11 octobre prochain.