Les Guinéens se rendent aux urnes ce 11 octobre 2015, pour élire un nouveau président de la république, dans un cadre totalement ouvert et décrispé, une nouveauté en république de Guinée. Aujourd’hui, l‘organisation du scrutin relève d’une institution indépendante (la Commission électorale nationale indépendante, Ceni) dans laquelle, pouvoir et opposition sont représentés sur une base paritaire. Le paysage médiatique est totalement libre, avec une presse privée et politique qui n’appartient pas à l’Etat, ni contrôlé par lui, en témoignent de nombreuses dérives qui conduiraient à des sanctions dans n’importe quel pays d’Afrique. Huit candidats en lice ayant déboursé chacun 800 millions de francs guinéens sont inscrits dans la compétition, ceux qui ont les moyens et les capacités, parcourent le pays, les autres se contentent du temps d’antenne équitablement reparti dans les médias publics entre les candidats par la Haute autorité de la communication (HAC). Chaque soir, chacun a sa petite heure de gloire pour se faire connaitre des Guinéens, notamment les candidats les plus modestes, ils sont au moins quatre : El Hadj Papa Koly Kourouma, candidat malheureux en 2010, ancien ministre de l’Energie et supporter du capitaine Moussa Dadis Camara, Lansana Faya Milimono, Georges Gandhi Tounkara et Marie Madeleine Dioubaté qui auront du mal a récupérer leur caution, faute d’atteindre le barème de résultat minimum fixé par la loi électorale, puisque ceux là font la campagne à Conakry.
Ensuite il y a le candidat Lansana Kouyaté, aussi candidat malheureux en 2010, un peu au dessus, avec son Parti de l’espoir pour le développement national (Pedn), qui marque notamment deux années d’absence sur le terrain et qui est arrivé à la dernière minute comme un cheval d’orgueil, qui a du mal à implanter son parti ou trouver un fief électoral sur le territoire national. Cette fois ses sorties sont plus modestes, son affichage électoral moins ostentatoire, a-t-il moins d’argent ou a-t-il compris l’évidence des résultats du scrutin ? Face au président sortant, deux candidats qui tiennent la route, attaquent mais ne proposent rien : Cellou Dalein Diallo et Sydia Touré, deux anciens Premiers ministres qui ont géré dans le passé. Le premier n’est jamais sorti du bloc identitaire qui constitue son électorat de ressortissants de la Moyenne Guinée, incapable de transversalité dans son discours et ses actions, il ne progresse jamais dans d’autres régions, il ne dépense jamais son propre argent, son financement reste communautaire avec des dons venus de gros commerçants qui misent depuis 2010 sur son arrivée au pouvoir. Aujourd’hui il est en rupture avec sa base, depuis le projet d’alliance raté avec le capitaine Moussa Dadis Camara, qu’il rêvait de transformer en élément de déstabilisation du régime en place. Cette affaire empoisonne sa vie, lui, l’homme qui affirme être la principale victime des évènements du 28 septembre 2009, qui a pourtant obtenu son propre dédommagement de 2 milliards de francs guinéens par le gouvernement de transition en 2009, alors que les familles des victimes attendent. Son parti est partagé entre une base communautaire et une autre tentée par un dialogue constructif avec l’Etat, notamment quelques bailleurs de fonds, Cellou perd les pédales et menace, tout en menant campagne.
Depuis la tournée du Président au Foutah, conduit jusqu’à Dalein, le village de Cellou, il fait planer le spectre de la violence sur le scrutin, alors qu’il est signataire d’un accord de dialogue et de paix pré électoral. Il joue la provocation pour resserrer les foules de partisans derrière lui. Mais pourquoi Cellou va perdre : le président a un bilan interne dont les Guinéens apprécient la portée sur le plan économique et social. Le président Alpha Condé cultive une politique de proximité qui l’a conduit à visiter les principales petites agglomérations de la Guinée, a géré la crise sanitaire avec un leadership sur la région, rétabli les ponts avec toutes les institutions internationales financières. Sidya Touré lui, a pris ses marques avec l’Ufdg, faute d’avoir pu obtenir le statut de candidat unique de l’opposition, aujourd’hui en rupture avec Cellou qui lui a offert de nombreux électeurs pour les législatives de septembre 2013. Aujourd’hui, son électorat se rétrécit, il n’est pas avec Cellou Dalein Diallo, et la grande partie de son électorat est partie chez le président Alpha Condé…
Aly S Camara