Monsieur le président,
Honorables membres de la cour,
Je vous remercie pour l’occasion que m’offre votre cour afin de situer ma responsabilité dans la crise qui a endeuillé mon pays. Je suis Charles Blé Goudé, natif de Kpogrobré, sous-préfecture de Guibéroua, dans le centre-ouest de la Côte D’ivoire.
Monsieur le Président,
La justice, il ne faut pas la fuir ; il faut se soumettre à elle, surtout quand on ne se reproche rien. En tout cas, dans mes rapports avec mes concitoyens, aucune goutte de sang ne crie contre moi. Au cours de ce procès, les vraies preuves qui devront condamner ou libérer chaque acteur politique, ce ne seront pas les présomptions et les soupçons de l’accusation. Ce ne seront pas non plus les rapports d’experts souvent autoproclamés, qui pourtant ne savent pas grande chose des circonstances dans lesquelles les faits allégués se sont déroulés.
Les déclarations à charge d’adversaires politiques sélectionnés ne sauraient non plus servir de base crédible pour éclairer votre cours. Car, monsieur le président, dans une affaire qui a opposé deux camps, que peut-on espérer que mes adversaires et leurs militants transformés en témoins, puissent dire de moi ? Simple question de logique !
Monsieur le président,
les vraies preuves ce sont les actes que chaque acteur politique aura posés au cours de la longue crise qui a endeuillé la Côte D’ivoire. Malheureusement, quand j’ai fini d’écouter l’accusation, toute la nuit d’hier, dans ma cellule, une interrogation n’a cessé de me tarauder l’esprit ; elle m’habite encore cet après-midi, la voici : L’ACCUSATION CHERCHE-T-ELLE LA MANIFESTATION DE LA VÉRITÉ OU CHERCHE-T-ELLE FORCEMENT A RENDRE COUPABLE UNE PERSONNE DÉJÀ STIGMATISÉE DONT ELLE VEUT OBTENIR CONDAMNATION A TOUT PRIX?
Or, il ne s’agit pas ici de rapiécer des morceaux de faits, dans le seul objectif de faire condamner un supposé ennemi de la paix que l’on aura pris le soin de pré-fabriquer. Au cours de ce procès, monsieur le président, au-delà d’une simple recherche de condamnation ou d’une relaxe, c’est selon, il s’agira ici de restituer et de situer les événements et les faits dans leur vrai contexte pour faire jaillir la vérité des décombres sous lesquels, l’on tente hélas, de l’ensevelir. Ainsi éviterons-nous de participer à tordre le cou à notre histoire pourtant trop récente.
Ce procès, monsieur le président, représente beaucoup pour l’Afrique et il compte aussi pour une Côte D’ivoire qui est encore à la recherche de la voie adéquate en vue de panser les plaies de la crise postélectorale qui peinent à se cicatriser. Ce procès revêt une portée pour les victimes que l’on tente hélas de catégoriser.
Je n’ai cessé de le dire et je le répète encore aujourd’hui, il n’y a pas de victimes pro Ouattara d’un côté et de victimes pro Gbagbo de l’autre : Un cadavre n’a pas d’appartenance politique, une vie humaine est égale à une vie humaine. La victime et la seule, c’est la population ivoirienne dans sa diversité ethnique, religieuse et politique. «Il n’existera jamais une Côte D’ivoire où ne vivront que des pros Gbagbo au détriment des Pros Ouattara tout comme il ne peut y avoir une Côte d’ivoire où ne vivront que des pros Ouattara en faisant disparaitre les pros Gbagbo.»
Monsieur le président
les propos que vous venez vous-mêmes d’entendre dans la vidéo que mon équipe de défense vous a fait voir tout à l’heure, je ne les ai pas tenus avec des chaines aux pieds ; je les ai tenus en homme libre, en pleine crise postélectorale sur un plateau de télévision. C’est une preuve parlante qui vient dire à la cour que je ne suis pas le criminel qui selon les allégations du procureur, aurait eu pour mission de faire exterminer les partisans de l’adversaire du Président Laurent Gbagbo.
-Pour moi, la Côte D’ivoire est un TOUT qui a besoin de TOUS !
-Pour moi, la recherche de la paix n’est pas saisonnière.
Honorables membres de la cour, au sens juridique, une milice désigne un groupe de personnes armées ayant militairement pris part à un conflit armé… monsieur le président, notez bien le substrat militairement.
Ainsi défini, je puis solennellement vous dire que jamais je n’ai été un chef de milice, je ne le suis pas aujourd’hui, je ne le serai pas demain ; parce qu’aussi simple que cela puisse paraitre, je ne suis pas un adepte de la lutte armée. Il n’est pas superfétatoire de préciser à la cour que le COJEP n’est pas une milice, contrairement à ce qu’affirme l’accusation.
Le COJEP n’est pas non plus un club de soutien comme tente aussi de faire croire une certaine opinion dont j’ignore les intentions qui en réalité n’ont rien à voir avec les objectifs que le COJEP et ses militants se sont librement fixés eux-mêmes. Il n’est pas juste de vouloir assigner au COJEP, en l’absence de son leader, une mission contre le gré de ses militants. Honorables membres de la Cour, pour notre gouverne à tous, et pour que les choses soient désormais plus claires pour tout le monde, je voudrais préciser que dès sa création, le COJEP a d’abord été un mouvement de pression autonome, ensuite un mouvement politique non inféodé, puis depuis le 15 Aout 2015 par la seule volonté de ses militants, le COJEP s’est librement mué en un parti politique avec pour premier secrétaire, Docteur Hyacinthe Obou, professeur de philosophie à l’université de Bouaké en Côte D’ivoire.
Comme toutes les autres formations politiques de mon pays, le COJEP entend pleinement participer à la vie politique de la Côte D’ivoire et ambitionne patiemment d’occuper la place qui est la sienne sans complexe aucun. Voilà ce qu’est le COJEP : VOILA LA VERITE ! Ceux qui soutiennent le contraire se trompent eux-mêmes (et ils le savent bien) mais aussi ils tentent vainement de tromper l’opinion, ce qui ne saurait nullement prospérer. Du haut de cette tribune, je voudrais dénoncer Cette falsification de l’histoire, de notre propre histoire.
Monsieur le président,
au cours de la crise, j’ai pris mon temps, mon énergie, à travers des campagnes, pour dire aux différentes chapelles politiques qu’une nation, ce n’est pas seulement un espace géographique que des populations ont en commun ; mais, une nation c’est aussi et surtout des valeurs que partage un peuple. J’ai à plusieurs occasions fait des propositions citoyennes et des appels à la retenue. Hélas, la passion qui s’était emparée de certains candidats à la présidentielle et de leurs partisans avait rendu inaudible le bien fondé de mes différents appels.
Pendant que le procureur m’accuse d’être un extrémiste qui appelle au meurtre, d’autres personnes par contre me qualifient de faiblard qui a peur de la guerre. Oui, honorables membres de la Cour, je l’ai dit avant la crise et je le dis encore aujourd’hui sans honte, j’ai peur de la guerre, parce que, à un homme normal, la guerre devrait faire peur.
Je ne le dis pas par couardise ou par lâcheté ; je le dis par responsabilité et par franchise envers les ivoiriens. Les ivoiriens m’ont tout donné, en retour je leur dois beaucoup, je leur dois d’utiliser à bon escient la popularité qu’ils m’ont donnée pour contribuer à sauver des vies humaines, pour sensibiliser au pardon et à l’union de tous les ivoiriens sans exclusive et non pour le service d’un clan.
Je trouve donc irresponsable que dans mon pays, des leaders, dans le seul but de passer pour des courageux ou pour se faire acclamer font croire à leurs partisans que la guerre ne fait pas peur.
De tels leaders, souvent loin des champs de bataille, ignorent la désolation que la guerre sème dans des familles. COMME QUOI, UN BEBE AU DOS NE SAIT PAS QUE LA ROUTE EST LONGUE. Et pourtant, dans son œuvre la fabrication de l’ennemi, ce célèbre auteur, Pierre Conesa nous conseille : et je cite, « pour réduire les causes des conflits, il faut à notre monde des leaders politiques de qualité qui puissent renoncer au capital politique qu’un discours belliciste peut apporter ; il nous faut aussi des élites civiles et militaires conscientes de leurs responsabilités. » Fin de citation.
C’est pourquoi face aux railleries qui m’ont traité de faiblard et que le procureur feint de ne pas entendre, j’ai toujours répondu que je préfère être faible au milieu d’êtres qui ont la vie que de paraitre pour fort parmi des corps sans vie. Quand je le disais, je ne savais pas que je viendrais un jour le répéter ici à la CPI, quand je le disais nous étions à mille lieux de la crise postélectorale, mais au milieu des accusations dont j’avais été victime, j’avais gardé ma lucidité (je la garde toujours) car déjà j’avais conscience qu’il fallait éviter d’allumer la buchette de la guerre du voisin contre le voisin, de l’ami contre l’ami.
J’attirais déjà l’attention des uns et des autres sur les risques d’une guerre civile. C’était en juillet 2006 dans une interview dont mon conseil, maitre N’dry Claver vient de faire cas. Je me justifiais ainsi Face à une cascade d’accusations consécutives à un appel lancé pour faire cesser des affrontements entre les populations au sujet des audiences foraines. Pour moi, il fallait agir pour sauver des vies humaines.
Je voudrais ici remercier et féliciter mes collaborateurs de l’alliance (que je n’ai pas besoin de citer.) et mes amis de la jeunesse de l’opposition de l’époque avec qui nous avions bravé les injures pour éviter de justesse une guerre civile à notre pays.
Il s’agit entre autres de Konan Kouadio Bertin dit KKB du PDCI, de Karamoko Yayoro du RDR, de mon frère Stéphane Kipré à l’époque du MFA, mais aujourd’hui président de l’UNG. Chers amis, quand la passion aura fait place à la réflexion, la mémoire de l’histoire saura un jour reconnaitre le bien que vous avez fait à la Côte d’ivoire un 26 juillet de l’an 2006. L’accusation tronque donc les faits en me désignant comme l’instigateur qui aurait empêché les partisans de l’actuel président de se faire recenser lors des audiences foraines en 2006. Ce n’est pas vrai, ce n’est pas juste !
Monsieur le président,
vous le voyez bien, vous l’entendez aussi vous-mêmes, ce n’est donc pas un discours opportuniste ou stratégique que je tiens aujourd’hui devant votre cour, juste pour me sortir d’affaire ; c’est un discours que j’ai toujours tenu et que je tiendrai toujours, par principe, par éducation politique, malgré les railleries et les critiques que cela continue de m’attirer. Car je le sais,
-être leader ce n’est pas seulement chercher à se faire acclamer.
-être leader c’est aussi avoir le sens de la mesure
-être leader c’est savoir mettre son peuple à l’abri des conflits,
C’est pourquoi j’ai bravé les extrémistes des deux camps antagonistes pour aller à la rencontre des victimes afin que leur appel au pardon puisse cimenter la fondation de la réconciliation en Côte D’ivoire. Monsieur le président, je vous avais dit que mes actes parleraient pour moi.
CAMPAGNE EN FAVEUR DE LA PAIX : slogans campagne de paix. (Vidéo1 : Prisca et femme pantrokin)
Prisca, la jeune fille que vous venez de voir dans cette vidéo avait été violée par les rebelles. En révélant son histoire à la Côte D’ivoire, J’ai contribué à lui redonner goût à la vie. Elle a été un symbole du pardon. Quant à la dame au bras coupé, ces bourreaux lui avaient donné le choix entre garder son bébé ou voir son membre supérieur lui être tranché. Comme toute bonne mère, elle a choisi que son bras lui soit coupé afin de sauver la vie à son bébé. Elle aussi a été un symbole pour le pardon et la paix.
A cette époque, il fallait du cran et de l’audace, pour effectuer une telle mission de paix, mais je l’ai fait. Les villages de Pantrokin et Guiélé d’où sont originaires ces deux victimes, existent encore dans l’ouest profond de la Côte D’ivoire, c’est à Toulepleu. Si la procureure cherche vraiment à savoir ce qui s’est réellement passé dans mon pays, son équipe et elle peuvent s’y rendre. Pour vous dire que j’ai fait ce que je pouvais, et que je ne suis pas un chef de milice.
Le seul problème ici, c’est que l’accusation cherche à démontrer ce qui n’a jamais existé. Si non, pour retrouver les chefs de guerre et les chefs de milices en Côte D’ivoire, ce n’est pas du tout compliqué. Il suffira par exemple au bureau de la procureure de se référer aux documents et aux archives des différentes opérations de démobilisation, de désarmement et de réinsertion des milices et de tous les autres groupements armés ayant militairement pris part au conflit en Côte D’ivoire. L’accusation y trouvera facilement l’identité et la signature des différents chefs de milices et des groupes armés. Cela au moins, a l’avantage d’être un fait avéré, un fait vérifiable, ce qui pourrait faire gagner du temps à la cour.
Ni le Cojep, ni l’alliance des jeunes patriotes, ni mon nom n’y figurent. Car, entre prendre les armes et faire la politique, j’ai fait librement le second choix, parce que pour moi, comme l’eau et l’huile, la démocratie et les armes ne peuvent pas faire bon ménage.
Monsieur le président,
comme cela se fait partout dans le monde quand les institutions de la République sont en péril et que les valeurs qui fondent notre société sont bafouées, contrairement à ceux qui ont choisi les armes et la barbarie comme moyens d’expression, et qui endeuillent notre monde, les populations civiles et moi nous avons choisi la voie démocratique, nous avons pris la rue, les mains nues pour défendre les institutions de la République qu’incarnait SON EXCELLENCE le Président Laurent Gbagbo, ici présent.
Je n’ai donc pas soutenu Laurent Gbagbo parce qu’il serait de la même ethnie ou de la même religion que moi comme tente de faire croire l’accusation. Faire une telle affirmation serait méconnaitre l’histoire de la Côte d’ivoire. Pour preuve, je ne suis ni militant, ni membre, ni responsable dans aucune instance du front populaire ivoirien, le parti politique dont Laurent Gbagbo est le fondateur. La cour le sait-il ?
Honorables membres de la cour,
Comme beaucoup de jeunes de ma génération, J’ai soutenu Laurent Gbagbo pour les valeurs qu’il incarne. Ce que je sais de cet homme, c’est qu’il a sacrifié sa vie pour l’avènement du multipartisme et de la démocratie dans mon pays. La pluralité de la libre expression en Côte D’ivoire est le fruit de plusieurs séjours carcéraux endurés par Laurent Gbagbo, sa famille et nombreux de ses camarades de lutte, opposants à l’époque qui l’ont accompagné non pas seulement sur le chemin de la conquête du pouvoir, mais sur les routes rocailleuses pour la promotion des valeurs démocratiques. Voilà la vérité !
Votre honneur, Je ne suis donc pas homme à me renier. Je suis mature et je sais faire la différence entre le combat et la querelle. Dans ma génération, j’ai très tôt pris la mesure de mes responsabilités. S’il y a une chose que j’ai toujours refusée, c’est d’être traité comme une marionnette que l’on peut pendre au bout d’un fil et à qui l’on peut donner des ordres de quelque nature que ce soit.
Il est même arrivé à plusieurs occasions que le COJEP, le parti politique auquel j’appartiens, ait pu exprimer des opinions politiques publiques contraires à celles du parti politique du Président Laurent Gbagbo ; mais en tant que démocrate dans l’âme cela n’a jamais dérangé Laurent Gbagbo.
Laurent Gbagbo nous a enseigné que la vérité est fille des contradictions.
Voilà l’homme que je connais, Voilà l’homme que j’ai soutenu comme beaucoup d’autres personnes en liberté l’ont aussi fait, peut-être même plus que moi. Cela ne fait pas de moi membre d’un prétendu entourage immédiat qui aurait conçu et exécuté un plan commun. Laurent Gbagbo ne m’a jamais envoyé pour inciter les jeunes à commettre des tueries contre des populations comme tente de faire croire l’accusation. Voilà la vérité !
Quant à moi, Je continue de croire qu’un adversaire politique n’est pas un ennemi.Convaincre et non contraindre, Convaincre et non vaincre,
Telle est la philosophie pour laquelle je continue d’essuyer les critiques des plus acerbes. Et pourtant, ces valeurs sont ancrées en moi et rien ne m’oblige à y déroger, même pas les coups durs que j’ai reçus de l’adversaire. C’est la pratique de cette philosophie qui a expliqué les différentes invitations que j’ai faites à mes autres frères qui avaient cru bon de prendre les armes pour faire aboutir leur cause qu’ils croyaient être juste. Avec tous les risques que cela comportait, J’ai bravé les injures et les menaces pour faire campagne auprès des populations afin que celles-ci acceptent mon frère SORO, mon frère Wattao, mon frère Konaté Sidiki, mon frère Fofana Bèma, mon frère Konaté Zié, mon frère Abel Djohoré, pour ne citer que ceux-là.
Cette tâche n’a pas du tout été facile pour moi, elle n’a certainement pas produit les résultats escomptés, mais je l’ai accompli avec conviction et avec fierté. Pour moi, il vaut mieux avoir agi et avoir échoué que de n’être jamais passé à l’action. Monsieur le président, Pour le retour de la paix dans mon pays, j’étais prêt à tout braver, je suis toujours prêt à tout braver. Paradoxalement, c’est moi qu’on traine aujourd’hui devant les tribunaux pour que je puisse répondre de crimes contre l’humanité. Ah, que ce monde est injuste ! Mais j’ai foi en votre cour pour faire connaitre la vérité.
(VIDEO Vidéo2 : délégation FN à Kpo, ou apothéose caravane à yop (remerciements sidiki K) (vidéo, invitation FAFN et SORO à Gagnoa et Mama, Gnaliépa)
Monsieur le président, comme vous venez de le voir, je ne faisais pas partie d’un plan commun qui aurait consisté à tuer des civiles dans le seul but de maintenir un individu au pouvoir par des moyens criminels. Comme tout citoyen l’aurait fait, Je pense avoir fait Pour mon pays, ce que je devais.
Pendant la crise postélectorale je n’ai jamais voulu que les civils fassent la guerre à la place des militaires, parce que ce n’est pas leur rôle. Là où il y a les armes, les civils n’ont pas leur place. Vu que les rebelles étaient embusqués dans tout le district d’Abidjan, Je ne voulais pas faire des jeunes de Côte D’ivoire une chair à canon, c’est pourquoi, dès fin mars 2011 je n’ai plus appelé à des manifestations publiques. J’ai toujours voulu que les jeunes vivent afin qu’ils puissent un jour profiter des projets politiques que les différents leaders qui ambitionnent de diriger la Côte d’ivoire mettraient en place.
Honorables membres de la cour,
en 2010, c’est le Conseil Constitutionnel qui a rendu une décision qui donnait le candidat Laurent Gbagbo vainqueur des élections; ce n’est pas moi. Parce-que je suis respectueux des lois de la République, comme tout citoyen je n’ai fait que constater cette décision et je me suis soumis à elle. Maintenant, si l’accusation estime que la décision rendue par le Conseil Constitutionnel a été source de conflit, elle devrait en principe s’en prendre à cette institution et à ses responsables et non s’en prendre aux personnes qui n’ont fait que constater à une décision consacrée par la loi. Une telle démarche me semblerait plus cartésienne, donc plus logique. Alors, monsieur le président, en me maintenant en prison, la CPI ne laisse-t-elle pas en liberté l’épervier pour emprisonner la mère poule qui pourtant a perdu ses poussins ?
MON APPEL A LA PAIX
Comme la Côte D’ivoire doit continuer de vivre,
-A ceux qui ne m’avaient pas compris, je rappelle que la voie des armes et de la force est sans issue, elle n’a apporté que meurtrissures et désolation à notre pays.
-Je ne connais pas aujourd’hui un seul ivoirien qui n’ait pas expérimenté, directement ou indirectement le goût amer de la guerre. C’est pourquoi, du haut de cette tribune, j’appelle une fois encore tous les ivoiriens à la réconciliation et à la tolérance.
Bien que je sois encore en prison, Je souhaite le retour d’une paix durable dans mon pays. Je ne parle pas de cette paix d’hégémonie où un groupe qui détient la force soumet un autre groupe qui dans le silence, n’attend que la moindre occasion pour se venger un jour. Une telle paix en trompe-l’œil est fragile. Je parle d’une paix qui pourra réellement apaiser les cœurs et les esprits pour le retour de l’harmonie entre voisins.
Les nouveaux rapports entre les protagonistes des conflits qui ont marqué l’histoire de l’humanité, nous enseignent que quelle que soit l’intensité ou la durée d’une crise, les adversaires finissent toujours par s’assoir autour d’une table pour trouver une solution négociée. Et les exemples dans le monde sont légion : D’abord le couple franco-allemand nous prouve que les pires ennemis d’hier peuvent s’avérer des partenaires à vie ; ensuite le récent rapprochement entre les Etats Unis et Cuba, puis l’accord sur le nucléaire iranien ont fini d’établir la suprématie du dialogue sur la force.
C’est que je souhaite pour mon pays, car, ce qui a fait recette ailleurs peut aussi être possible en CI. Les ivoiriens ont déjà été trop traumatisés, il faut éviter davantage de leur faire peur. Aujourd’hui, ils ont besoin d’une classe politique et d’une atmosphère qui puissent les rassurer. En ce qui me concerne, Je ne chéris pas ma liberté plus que celle des ivoiriens ; et mon maintien prolongé dans les liens de la détention ne saurait me détourner des valeurs qui sont encrées en moi et pour lesquelles je milite.
-je milite pour la tolérance,
-je milite pour le pardon,
-je milite pour la cohésion sociale,
-je milite pour le retour d’une paix durable dans mon pays.
– je milite pour une compétition politique saine et sans violence
le président,
Quelle que soit ma position géographique, je répondrai toujours à l’appel de mon pays. De ma cellule de prison, je continuerai à apporter modestement ma contribution au retour de la paix dans mon pays. Mais le mieux, serait que je sois dehors pour toucher de près la réalité afin que mon regard soit en conformité avec la psychologie de l’ivoirien que je n’ai plus revu depuis cinq ans. Permettez-moi d’aller terminer mes chantiers de paix et de réconciliation que j’ai laissés en friche dans mon pays.
Paix et amour sur la Côte d’Ivoire.
Je vous remercie
Charles Blé Goudé