Invité de la radio Djigui FM, l’ancien ministre-secrétaire général à la présidence, Alpha Ibrahima Keira, aujourd’hui un des alliés du président Alpha Condé, a expliqué sa première rencontre avec le président d’alors, Lansana Conté, son beau, qui remonte en 1998. Des extraits :
Grève de 2007 : quand le syndicat trouva Keira chez Conté
« Quand on tient compte de la teneur du communiqué du syndicat, on sent que le préavis de grève n’avait aucune revendication catégorielle. Il parlait de vacances du pouvoir, de l’incapacité du président de la république et le départ du gouvernement. C’était une véritable atteinte aux institutions. Pour renverser un régime, il fallait saboter.
Un jour, au plus fort moment de la grève de 2007, j’étais ministre des transports, je reçus un ami, Nana Souna Yansané, qui disait être porteur d’un message de la part du syndicat. Il voulait que j’intercède au près du président pour qu’il accepte de rencontrer le syndicat en vue de lever certains blocages. Donc, il y avait une attitude déloyale de la part de certains facilitateurs des négociations et le syndicat. J’ai décliné, mais à force d’insister, en bon patriote, je partis voir le président. Il était seul. Je lui dis que le pays allait mal et qu’il avait un déficit de confiance entre le pool de négociateurs et le syndicat. Je lui demandai de s’y impliquer pour pouvoir dépasser ce cap. Heureusement, il accepta.
Séance tenante, il envoya son protocole pour aller chercher le syndicat à la Bourse du Travail. A leur arrivée, ils me trouvèrent à côté du président dans la cour du palais des nations sous l’arbre. Nous les attendions. Certains d’entre eux s’offusquèrent de me voir là, ignorant que j’étais le facilitateur des négociations directes avec le président. Je ne dis aucun mot. Ils n’avaient rien dit sur moi. Le président les écouta. Enfin, il leur dit de lever la grève, parce que lui-même observait leur mot d’ordre. Ceci fait, il agirait. Je crois qu’ils étaient rentrés satisfaits. Sur 18 points de revendication, seize avaient été déjà réglés. Il restait deux autres.
Des adversités à son égard
A la fonction publique, j’avais radié plus de trois mille agents des effectifs. J’ai radié des morts qui percevaient des salaires. J’ai également radié plus de mille hauts cadres, déchus, qui étaient en séjour à l’étranger. Aussi, près de douze mille cadres devaient valoir à la retraite depuis sept à neuf ans. Mais ils refusaient, par plusieurs subterfuges. Enfin, j’avais mis à la retraite plus de huit membres du gouvernement d’alors.
De sa collaboration difficile avec Fodé Bangoura
En Guinée, ce sont les intrus qui opposent les personnes. Ils passent raconter des histoires d’un bureau à un autre. Ensuite, ils cherchent des charlatans pour vous nuire. Pour ma part, je n’en veux à personne. Les problèmes ont commencé, lorsque j’étais secrétaire général du ministère des affaires étrangères. J’ai constaté du faux et d’usage de faux dans les demandes de visa et la délivrance des passeports diplomatiques.
Cela provenait de certains ministères et parfois des services de la présidence. Grâce à ma vigilance, je renvoyais purement ces requêtes avec des preuves. Cela me valut des inimitiés. Ils entamèrent des démarches nocturnes pour m’enlever.
« La première fois que je voyais Conté face-à-face »
Ils ont cherché à m’éloigner du pays en me nommant comme ambassadeur en Chine sans m’en informer. Or, je suis l’initiateur du projet de la promotion de la diplomatie de carrière. Finalement je fus arbitrairement nommé ambassadeur en Chine. Quand la réponse arriva, malheureusement, elle tomba dans mon bureau. En fouillant les dossiers, je vis que la Chine avait accepté ma nomination. J’ai dit que je ne suis pas demandeur. Après cinq ans de loyaux services au secrétariat général des affaires étrangères, la moindre promotion, c’est la confirmation ou la nomination au poste de ministre. Le ministre Zainoul Sanoussy voulait me mettre devant le fait accompli.
Comme je protestais, le président fut au courant. Il proposa de rencontrer tous les nouveaux ambassadeurs avant leur départ pour leur nouvelle affectation. C’était la première fois que je voyais Conté face-à-face, en 1998. Je m’étais déjà marié à sa sœur. Il m’interpella au sujet de mon refus d’aller en Chine. Je lui ai demandé de me laisser au secrétariat général des AE à défaut de me nommer ministre. Il me regarda dans les yeux. Je lui dis que je souhaitais rester aux AE. Il accepta. Il dit qu’il n’était pas fâché et qu’il ne me ferait pas des représailles. Je sortis de son bureau et il reçut les autres.
Il appela plus tard le ministre Zainoul de me rayer sur sa liste. Le décret fut signé et je ne suis pas allé en Chine. La pilule resta à leur gorge. En 2000, ils firent un projet de mini-remaniement ministériel, nommèrent quatre à cinq ministres. Vous avez dit Fodé Bangoura. Ils firent une permutation en m’envoyant à la fonction publique.